AUX ETATS-UNIS, selon le Pr Arnaud Basdevant, chef du service d'endocrinologie à l'Hôtel-Dieu de Paris, l'augmentation du nombre de cas d'obésité morbide pourrait à terme faire diminuer l'espérance de vie moyenne de ses habitants. En France, même si on n'en est pas encore là, les chiffres ne sont pas rassurants, puisque les formes graves de l'obésité touchent environ 0,6 % de la population.
La chirurgie étant en pointe dans l'arsenal thérapeutique de l'obésité morbide (la technique de la pose d'un anneau gastrique opérations), la Cnam a réalisé une enquête nationale sur cette chirurgie en plein développement (1), et a établi à cet effet « un état des lieux approfondi de la prise en charge chirurgicale de 2 069 patients opérés, ou qui avaient une opération programmée entre décembre 2002 et janvier 2003 ». Parmi ces patients, 84 % étaient des femmes, leur âge moyen était de 39 ans, avec un indice de masse corporelle moyen de 44 kg/m2, et des pathologies associées essentiellement composées de diabète ou de HTA. Selon les résultats de l'enquête, l'ensemble des recommandations n'ont pas été strictement respectées pour les deux tiers des patients et, pour 16 % d'entre eux, l'opération était contre-indiquée, soit parce que l'indice de masse corporelle était inférieur au seuil préconisé (40 %), soit en raison de la présence d'une pathologie associée. La Cnam appelle donc à une révision des recommandations de bonne pratique afin de les rendre plus claires. Mais, surtout, pour le Pr Basdevant, « la chirurgie de l'obésité n'est qu'un élément parmi d'autres d'une prise en charge chronique qui doit s'inscrire dans une stratégie cohérente ».
Plus de 45 kg au-dessus du poids idéal.
Pour le Pr Jean-Marc Chevallier, chef du service de chirurgie digestive de l'hôpital européen Georges-Pompidou à Paris, « la chirurgie de l'obésité a, certes, fait la preuve de son efficacité, mais elle n'intéresse que l'obésité morbide, à savoir des patients qui sont à plus de 45 kg au-dessus du poids idéal ». De plus, précise-t-il, la technique de l'anneau gastrique n'est pas la seule, même si elle occupe une place prépondérante dans l'arsenal chirurgical. A l'hôpital Georges-Pompidou, selon ses chiffres, sur 1 000 patients opérés par la technique de l'anneau gastrique, 8 ont souhaité ultérieurement se le faire enlever. La mortalité postopératoire s'est élevée à 0,2 % des patients, et il y a statistiquement un risque de devoir être réopéré dans 10 % des cas, les principales complications étant le glissement de l'anneau ou la dilatation de l'oesophage. La Cnam indique en fin de l'étude que les société savantes et l'Anaes (Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé) ont préconisé la mise en place d'une procédure de suivi de l'activité, avec notamment la création d'un registre national, pour mieux connaître la sécurité d'utilisation des dispositifs implantables.
(1) L'enquête complète est consultable en ligne sur le site de l'assurance-maladie : www.ameli.fr, rubrique « connaître l'assurance-maladie ».
Les dix points clés
1) La décision d'intervention résulte d'une analyse collégiale par une équipe multidisciplinaire.
2) Cette procédure ne s'adresse qu'aux personnes présentant une obésité majeure retentissant sur sa santé.
3) Cette chirurgie ne peut être envisagée que chez des personnes ayant eu accès à une prise en charge médicale spécialisée globale d'au moins un an.
4) L'intervention est contre-indiquée chez l'enfant et l'adolescent, hors situation exceptionnelle.
5) L'intervention doit être pratiquée par un chirurgien formé et expérimenté en ce domaine, expert en chirurgie coelioscopique, en collaboration avec une équipe d'anesthésie-réanimation entraînée à la prise en charge péri-opératoire des obèses.
6) Deux types d'interventions sont pratiquées : les unes, de réduction gastrique simple (gastroplastie verticale calibrée et anneaux ajustables), les autres favorisant une malabsorption intestinale associée (court-circuit gastrique ou « by-pass »). Le choix revient conjointement au patient et à l'équipe.
7) Une information doit être fournie sur les risques immédiats de l'intervention et ses suites, ses conséquences sur la vie quotidienne, les habitudes alimentaires et la santé.
8) Un suivi médical et chirurgical est impératif. Il est de la responsabilité du médecin qui a posé l'indication opératoire et de l'équipe qui l'a prise en charge.
9) Le matériel implanté peut être source de complications. Un contrôle est recommandé afin de dépister une dilatation de poche ou une dilatation oesophagienne, une malposition de l'anneau.
10) Il est recommandé d'éviter une grossesse dans les tout premiers mois qui suivent l'intervention.
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