THEATRE
Petit à petit le théâtre Gérard-Philipe se transforme. La grande salle a été réaménagée et un gradin nouveau installé qui donne un excellent rapport plateau-public. L'élément principal reprend l'esprit de la scénographie de l'architecte Patrick Bouchain : du bois brut. Peu d'éléments, la note essentielle, un chatoiement de couleurs, est donnée par les costumes de Claire Risterucci et les masques de Patrick Géminci.
La pièce est difficile, échappe sans cesse. On croit tenir un sens, il se dissout. Alain Ollivier, qui connaît très bien l'uvre de Jean Genet, a trouvé le juste ton, le juste rythme, la juste distance des interprètes à cette langue ample et belle, une langue lyrique, rétive, qui traduit à merveille la rebellion de ceux qui organisent ce cérémonial déroutant. Genet disait que sa pièce ne pouvait s'adresser qu'à un public blanc et il précise dans un texte jusqu'alors inédit qui sera publié dans la Pléiade et que reproduit en partie le document remis aux spectateurs : « Cette pièce est écrite non pour les Noirs, mais contre les Blancs. »
Sur le plateau supérieur, les masques : la reine, le gouverneur, le missionnaire, le juge, le valet en habit. Sur le plateau inférieur, les artisans du jeu avec leurs noms qui disent l'asservissement dans lequel les colons les mettent : Ville-de-Saint-Nazaire, Augusta Neige, Vertu Diop, Félicité Gueuse-Pardon, etc... Alain Ollivier donne une unité très forte à sa troupe, il instaure une proximité troublante avec les acteurs. La pièce, créée par Roger Blin en 1959, n'a rien perdu de son acidité. C'est un poète qui parle, mais c'est aussi un homme qui a connu l'humiliation, le rejet, la violence de la société. La parole de Genet, vive, drue, est toujours actuelle. Il y a quelque chose de déchirant dans le propos, mais nulle complaisance : la férocité ricanante n'étouffe pas l'humanité des personnages, même ceux des masques. C'est en cela que la pièce est universelle et active.
Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis, à 20 h 30 du lundi au samedi (relâche mercredi), en matinée le dimanche à 16 h. Durée : 2 h 20 sans entracte (01.48.13.70.00). Jusqu'au 31 mars. Les 23 et 30 mars à 17 h, Lara Bruhl interprète « Un Captif amoureux ». A noter, dans le foyer du théâtre : une librairie et une exposition consacrée par l'IMEC (Insititut mémoire de l'édition contemporaine) à Jean Genet.
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