L’objectif de la réparation de tissus biologiques est d’obtenir une restitution ad-integrum du tissu lésé. Dans l’arthrose, c’est le cartilage. Deux grandes approches sont possibles : l’une, plutôt préventive, consiste à traiter les impacts en amont de l’arthrose, le plus souvent chez des sujets jeunes et sportifs. Elle est de loin la plus développée. L’autre, curative, beaucoup plus ambitieuse est aussi la plus problématique. Une fois l’arthrose installée, comment effectuer des réparations beaucoup plus importantes sur de grandes surfaces ?
Pour le Pr François Rannou l’analogie peut être faite avec les brûlures : « recoloniser la peau d’un grand brûlé est beaucoup plus compliqué que de greffer un petit lambeau de peau. De plus, dans l’arthrose, une fois que la maladie est établie, non seulement le cartilage est usé mais il y a aussi une activation du tissu synovial qui fait que les processus de dégradation tissulaire sont permanents ».
Jusqu’à présent les approches consistaient à injecter des cellules souches dans l’articulation ou bien à insérer une matrice dans l’articulation en espérant qu’elle soit colonisée. L’approche novatrice de l’équipe de F.Guilak est d’essayer d’associer les deux techniques pour greffer une matrice très proche du cartilage en terme biologique et biomécanique.
Quel est le cahier des charges ?
Il s’agit de fabriquer un échafaudage biocompatible servant de matrice tissulaire artificielle ; le coloniser avec des cellules souches pluripotentes obtenues à partir du tissu adipeux ; faire proliférer ces cellules souches dans la bonne direction pour créer du cartilage, mais aussi que l’ensemble s’intègre dans l’articulation et que cela tienne… « Il s’agit en quelque sorte de faire prendre une greffe », explique le Pr Rannou.
Pour orienter les cellules souches vers une différenciation en chondrocytes, les chercheurs utilisent des facteurs de croissance. Mais le phénotype des chondrocytes est très instable. Dans des conditions de culture non optimales, ils se transforment en fibroblastes, produisent du collagène de type I et développent un tissu inadapté. Coloniser la matrice avec des chondrocytes matures n’est pas la solution car ces cellules n’ont aucun pouvoir de prolifération lorsqu’elles ont un phénotype stable.
L’équipe de Guilak cherche donc à créer des conditions de cultures idéales. Elle colonise la matrice avec des cellules souches et essaye de les orienter vers un phénotype chondrocytaire stable en associant des facteurs de croissance à une stimulation mécanique des matrices colonisées.
Si cette équipe réussit à mettre au point cette potion magique, plusieurs problèmes resteront à résoudre et non des moindres : intégrer cette matrice dans l’articulation, faire en sorte qu’elle s’ancre et qu’elle tienne… et, à distance, non seulement que les douleurs diminuent, mais aussi que la fonction et les qualités des tissus s’améliorent pour s’approcher de la physiologie…
Les études actuelles chez l’animal apportent des résultats prometteurs. « Un énorme pas reste à faire pour éventuellement transposer ces études et résultats chez l’homme. Et la recherche translationnelle est souvent décevante », tempère le Pr François Rannou.
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