DES « GÉANTS de la montagne » outranciers et grotesques. Une oeuvre de 1901, « Avant le lever du soleil », aux accents fantastiques et mythologiques. Des jardins fleuris explosant de mille couleurs d'une intensité folle… Dès les premières toiles de l'exposition, le visiteur comprend qu'il est face à une peinture rare, un art mystérieux et fascinant, conduit par le rêve, l'imaginaire et le merveilleux.
Après ses premières années comme sculpteur ornemaniste sur bois, Nolde, formé à Munich puis à Paris en 1900, se jette dans la peinture et ne recule devant aucune audace. La fougue guide son pinceau. Après avoir emprunté au style de l'école danoise, caractérisé par une subtile froideur (magnifique et impassible « Clair de lune »), il découvre Van Gogh et laisse déborder les couleurs sur sa toile (« Printemps dans la chambre », « Jour de moisson »). Les artistes du mouvement Die Brücke (le groupe d'expressionnistes allemands parmi lesquels Kirchner, Karl Schmidt-Rottluff et Max Pechstein) l'invitent à les rejoindre à Dresde, et Nolde développera à leurs côtés une peinture vitaliste et violente, intrépide et libérée. Lorsque le groupe éclate en 1907, Nolde se lancera en solitaire dans son art, dont l'originalité et la verve ne se démentiront jamais.
Très attaché à son pays (la terre du Schleswig-Holstein, à la frontière germano-danoise), il peint des scènes quotidiennes et des paysages familiers qui sont l'occasion pour lui de laisser libre cours à sa fantaisie et à ce style si particulier, fait de sauvagerie et de douceur mêlées. Des moulins, des paysans aux yeux bleus, de jeunes chevaux, des tournesols, des prairies aux nuages menaçants peuplent ces toiles du Heimat (le pays natal, la patrie). Les oeuvres « Enfant et grand oiseau » et « le Forgeron » dégagent une tendresse et une simplicité exceptionnelles.
Ensorcelant.
Nolde transcende chacun de ses sujets par l'utilisation d'une palette brûlante, par la stylisation des formes et la monumentalité des figures, et par ce mélange d'expressivité et d'austérité qu'il prête à tous ses personnages et paysages. Le trait de ses gravures sur bois, lithographies et eaux-fortes est radical, sans concession. Dans ses toiles religieuses (notons ici la présence du somptueux polyptyque « la Vie du Christ »), le peintre fait preuve d'une «spiritualité profonde» pleinement débridée. Dans la série des nuits berlinoises, son pinceau danse et virevolte plus que jamais, ivre du mouvement des fêtes et bals masqués dont il s'inspire. Les portraits que Nolde réalisa après son voyage dans le Pacifique apparaissent remplis de magie et d'humanité. La mer Baltique et la mer du Nord sont pour le peintre des univers qui le conduisent à redoubler de ferveur et de violence pour reproduire la tempête ou les jeux de l'écume. Tout ce à quoi il touche est transfiguré et passionné. Ensorcelant. Une grande leçon.
Galeries nationales du Grand-Palais, Paris 8e. Tél. 01.44.13.17.17. Tlj sauf mardi, de 10 h à 20 h (mercredi jusqu'à 22 h). Entrée : 10 euros (TR : 8 euros). Jusqu'au 19 janvier. Catalogue, 304 p., 45 euros, RMN éd.
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