PRATIQUE
1) La GGT est une enzyme présente dans de nombreux tissus : foie, mais aussi rein et pancréas.
2) Son activité sérique normale est habituellement de 10 à 40 UI/l, mais elle peut varier d'un laboratoire à l'autre ; c'est pourquoi il est parfois recommandé d'exprimer les résultats en nombre de fois la limite supérieure de la normale (x N).
3) De nombreux facteurs sont positivement corrélés au taux de GGT :
a) sexe (masculin) ;
b) indice de masse corporelle (BMI) ;
c) consommation de :
i) alcool ;
ii) tabac ;
d) prise de certains médicaments, tels que :
i) pilule contraceptive ;
ii) phénobarbital.
4) Lorsque l'on supprime un inducteur de la GGT, le taux doit se normaliser en quinze jours.
5) En pratique, la conduite à tenir peut se schématiser en trois types de situation :
a) augmentation de la GGT associée à d'autres anomalies du bilan hépatique ;
b) augmentation isolée de la GGT ;
c) recherche de causes rares d'augmentation de la GGT.
B) Il existe d'autres anomalies du bilan hépatique
1) Lorsque l'élévation de la GGT s'associe à des stigmates de cytolyse (augmentation des transaminases) ou de cholestase (augmentation de la bilirubinémie et/ou des phosphatases alcalines), on peut être en présence de très nombreuses affections, tant hépatiques que biliaires.
2) Une augmentation des transaminases prédominant sur l'ASAT (SGOT) :
i) est évocatrice d'une étiologie alcoolique ;
ii) n'est cependant pas spécifique. En effet, un rapport ASAT/ALAT > 1 peut également s'observer souvent au cours d'une cirrhose et, cela, quelle que soit son étiologie.
3) Lorsqu'il existe une affection hépatobiliaire, la GGT est presque toujours augmentée (de l'ordre de 90 à 95 % des cas).
Lorsqu'il n'y a pas d'association avec une cytolyse (transaminases normales) ou une cholestase (phosphatases alcalines normales), les principales causes à rechercher sont les suivantes :
1) consommation excessive d'alcool ;
2) exposition à un médicament ou à un toxique ;
3) stéatose hépatique.
1) Consommation excessive d'alcool :
a) l'anamnèse précise la consommation déclarée d'alcool. On en fera la somme en grammes par jour (ou par semaine), en sachant qu'un verre vaut généralement 10 g ;
b) l'examen clinique retiendra l'existence de signes plus ou moins spécifiques, comme une maladie de Dupuytren, une parotidomégalie, une HTA ;
c) certaines anomalies biologiques sont évocatrices :
i) GGT. Il faut d'abord faire quelques remarques sur la GGT elle-même. D'une part, sa sensibilité n'est pas très bonne (de 40 à 90 %). D'autre part, sa spécificité n'est pas bonne non plus. Il faut donc se garder d'attribuer trop facilement son augmentation à une consommation excessive d'alcool ( Cf.supra). En revanche, son évolution après arrêt d'une alcoolisation est évocatrice : diminution d'environ 50 % en quinze jours, normalisation en deux mois ;
ii) macrocytose. Une augmentation du volume globulaire moyen (VGM), en particulier en l'absence d'anémie concomitante, est, lorsqu'elle existe, en faveur d'un éthylisme, mais non spécifique ;
iii) hypertriglycéridémie. C'est un signe indirect. En effet, celle-ci est schématiquement soit alcoolo-dépendante, soit glucido-dépendante ;
iv) un nouveau marqueur a été proposé plus récemment : la transferrine désialylée [Carbohydrate Deficient Transferrin (CDT)]. Son intérêt serait une plus grande spécificité.
2) Exposition à un médicament ou à un toxique : le rôle d'un interrogatoire orienté est fondamental :
a) inducteurs enzymatiques. Deux remarques :
- on en trouvera notamment dans les classes suivantes :
i) anticonvulsivants ;
ii) antidépresseurs ;
iii) hypnotiques ;
iv) hormones stéroïdes (peut se voir sous « pilule » contraceptive) ;
v) coumariniques ;
- l'augmentation de la GGT, sous l'effet d'un inducteur enzymatique, reste habituellement modérée (environ deux à quatre fois la normale), et elle est, bien sûr, réversible après l'arrêt du médicament ;
b) médicaments potentiellement hépatotoxiques. On s'en méfiera particulièrement : surveillance des transaminases, etc. ;
c) autres toxiques. On n'oubliera pas la possibilité d'exposition dans la vie professionnelle ou les loisirs (certains solvants, chlorure de vinyle, paraquat...).
3) Stéatose hépatique. Les affections dysmétaboliques sont, dans notre société, une cause très fréquente d'augmentation des transaminases et/ou de la GGT, par le biais d'une stéatose :
a) les trois principales étiologies sont les suivantes :
i) surcharge pondérale ;
ii) hyperlipidémie (hypertriglycéridémie) ;
iii) diabète (type 2) ;
b) sur le plan hépatique, le problème est la survenue possible de lésions hépatiques particulières susceptibles de poser des problèmes de diagnostic ou de pronostic :
i) problème diagnostique. Il peut exister en association à la stéatose des lésions d'allure pseudoalcoolique [Non Alcoholic SteatoHepatitis (NASH)] ;
ii) problème pronostique. Il peut s'associer à la stéatose des lésions (NASH) pouvant comporter de la fibrose et évoluer vers la cirrhose (de 15 à 20 % des cas) ;
iii) quelle est la place de la ponction biopsie hépatique (PBH) ? Lorsque l'on suspecte une NASH, que l'on envisage la possibilité d'une fibrose associée à la stéatose, on aura recours à la PBH. Notamment, en présence des facteurs prédictifs de fibrose suivants :
a) âge > 50 ans ;
b) indice de masse corporelle (poids en kg/taille en m2) > 28 ;
c) transaminases (ALAT) > 2 N ;
d) triglycérides > 1,7 mmol/l.
Il peut s'agir d'une des affections suivantes (liste non exhaustive) :
a) cardiopathie (congestive ou ischémique) ;
b) hyperthyroïdie ;
c) cancer (en l'absence de métastase hépatique) ;
d) polyarthrite rhumatoïde ;
e) brûlures étendues ;
f) formes familiales.
La proposition faite en A)4) est inexacte. En effet, lorsque l'on supprime un inducteur enzymatique de la GGT (médicament, alcool...), on n'obtient pas une normalisation complète en quinze jours, mais plutôt en quatre à huit semaines. A la 2e semaine, on pourrait cependant déjà noter une baisse significative du taux de GGT (de l'ordre de 50 %).
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