Les élections à la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) commencent aujourd'hui, avec l'envoi du matériel de vote aux quelque 57 000 médecins libéraux cotisants.
La CARMF va renouveler, de mars à juillet, près de la moitié de ses délégués et de ses administrateurs (« le Quotidien » du 5 février). Le Dr Gérard Maudrux, président de la caisse et du mouvement SOS-Retraite Santé, figure parmi ceux dont le mandat de six ans est arrivé à échéance.
Sur les 405 postes de délégué à pourvoir en 2003, 296 vont représenter les cotisants qui sont appelés à voter par correspondance jusqu'au 10 avril dans sept régions définies par la CARMF (Paris, banlieue parisienne, Nantes, Nancy, Limoges, Lyon et Toulouse). Les 109 autres postes de délégué concernent les collèges des retraités, des veuves et des invalides de la France entière. Les scrutins respectifs de ces derniers commenceront un peu plus tard, d'avril à mai.
Au début du mois de mars, la CARMF recensait 625 candidats pour le collège cotisants. Bien qu'il soit provisoire, ce chiffre montre le peu d'enthousiasme des médecins libéraux actifs à se présenter cette année, lorsque l'on sait que 1 030 candidatures avaient été enregistrées lors des dernières élections de 1997 dans les mêmes régions.
Deux cent cinquante candidats, soit 40 % du total, ont revendiqué expressément l'étiquette de SOS-Retraite Santé pour soutenir l'action du Dr Maudrux qui préside la CARMF depuis septembre 2000. En outre, les candidats qui se présentent sous le label de la Fédération des médecins de France (FMF, à laquelle le président de SOS-Retraite Santé vient d'adhérer) « ont fait savoir qu'ils étaient favorables au système Maudrux », indique le Dr Jean-Alain Cacault, responsable des dossiers de la retraite à ce syndicat. La FMF prône un « système mixte » combinant retraites par répartition et par capitalisation (1). Elle « veut un système vraiment libéral avec une fermeture de l'ASV (allocation supplémentaire de vieillesse) aux nouveaux cotisants », explique le Dr Cacault. Le régime ASV, cofinancé par les caisses d'assurance-maladie, représente aujourd'hui environ 39 % de la retraite totale des médecins libéraux conventionnés.
Le problème de l'ASV
Durant son dernier mandat, le président de la CARMF a fait de la fermeture de l'ASV son cheval de bataille. La consultation qu'il a organisée en 2002 sur le sujet a conforté sa position mais n'a pas réglé le problème, puisque la CARMF n'a aucun pouvoir décisionnaire sur cet avantage conventionnel.
Le Dr Maudrux le reconnaît d'ailleurs volontiers dans la profession de foi qu'il a envoyée aux électeurs. « C'est sur notre bilan que (les candidats de SOS-Retraite Santé) vont être élus », déclare le Dr Maudrux. Il range parmi « les acquis »: la réforme du régime de base en cours, et notamment la baisse de la compensation nationale à l'intérieur de ce régime, la stabilité à 9 % du taux de cotisation au régime complémentaire, ainsi que certaines mesures en attente de validation par la tutelle, comme l'amélioration de la couverture invalidité-décès et la possibilité d'achat de points facultatifs dans le régime complémentaire. Enfin, le président de la CARMF revendique pour son équipe une réputation de « bons gestionnaires, soucieux de préserver et de garantir les cotisations versées, honnêtes, soucieux de l'avis de la base et ne cachant rien ».
Bannière commune
Face aux candidats pro-Maudrux, au moins 150 à 200 candidats se présentent sous l'étiquette Avenir Retraite. Il s'agit d'une bannière commune choisie par plusieurs organisations syndicales (CSMF, SML, MG-France et le Syndicat national des médecins concernés par la retraite) et des associations (notamment le Comité national pour l'avenir de la retraite-CNAR). « Voir MG-France et la CSMF s'associer, c'est surprenant, pas très cohérent et pas très crédible », ironise le Dr Maudrux. « On partage un certain nombre de convictions dans le domaine de la retraite et pas dans d'autres », réplique le Dr Yves Decalf, spécialiste de ce secteur à la confédération.
Les fondateurs d'Avenir Retraite se défendent de vouloir constituer un front commun contre le président sortant de la CARMF. « Nous voulons éviter une personnalisation du débat ; Avenir Retraite est d'abord un groupe de réflexion », indique le Dr Roger Rua, du SML. Constitué à la fin de 2001, ce groupe s'est réuni plusieurs fois depuis. A l'origine, l'ensemble des centrales syndicales y ont participé, y compris la FMF, même si « elle n'a pas forcément partagé les points de vue d'un certain nombre d'entre nous », relève le Dr Patricia Mercier, de MG-France. Ce groupe « refuse la baisse de la retraite telle que la préconise le Dr Maudrux avec la suppression de l'ASV », résume le Dr Decalf. Les gens n'étant « pas toujours prévoyants », il rejette l'idée de remplacer à terme l'ASV par un système de capitalisation. Avenir Retraite propose « deux objectifs tenables » selon la CSMF, à savoir « un taux de remplacement des revenus de 50 % au minimum et un taux de cotisation inférieur ou égal à 20 %, contre 16 % aujourd'hui ».
Vision à long terme
Le niveau actuel des retraites peut être maintenu, affirme le Dr Decalf, si le régime de préretraite ou MICA (en voie d'extinction) fusionne avec l'ASV, si la valeur du C (qui sert à calculer les cotisations ASV) augmente à 23 euros dans quelques années, et si les cotisations des médecins augmentent progressivement sur sept ans (de 60 C à 90 C pour l'ASV et de 9 à 11 % pour le régime complémentaire).
« L'objectif, c'est qu'à l'occasion des élections CARMF on fasse entendre une autre voix », souligne le Dr Mercier. Néanmoins, nuance le Dr Decalf, l'enjeu d'Avenir Retraite ne consiste « pas à gagner les élections - d'autant que cela ne changerait pas la majorité actuelle -, mais d'imposer notre vision de la retraite dans une perspective à long terme ». En conclusion, prévient-il, il ne faut pas s'attendre cette année à « une bataille pour la reconquête de la CARMF ».
(1) Dans un système par répartition, les cotisants payent les retraites versées à leurs aînés. Dans un système par capitalisation, chacun paye pour sa propre retraite en faisant fructifier les cotisations déjà versées.
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