La consommation de MDMA, alias ecstasy, semble s'installer dans les murs, et les études consacrées aux effets du produit se multiplient.
Chez l'animal, une toxicité a été démontrée vis-à-vis des neurones sérotoninergiques, avec, chez les primates, des perturbations qui persisteraient sept ans au moins dans le néocortex.
Chez l'homme, des études par tomographie à émission de positron ou à émission de photon (SPECT : single-photon-emission computed tomography) ont montré une diminution du nombre de neurones sérotoninergiques centraux chez les gros consommateurs d'ecstasy. Le risque est de voir apparaître à plus ou moins long terme des problèmes neuropsychiatriques tels que dépression, anxiété, attaques de panique, dans lesquelles la sérotonine est impliquée.
Chez les raveurs d'Amsterdam
Une équipe néerlandaise a donc mené une étude supplémentaire chez les raveurs d'Amsterdam. Quinze usagers « modérés » ayant consommé en tout et pour tout moins de 50 comprimés dans leur existence ont été recrutés, ainsi que 23 gros usagers (plus de 50 comprimés) et 16 ex-usagers, qui avaient consommé un minimum de 50 comprimés, mais avaient abandonné l'ecstasy depuis un an au moins.
Toutes ces personnes pouvaient prendre d'autres drogues. Un groupe contrôle de 15 personnes a par ailleurs été constitué avec des usagers de diverses drogues, excepté l'ecstasy. A tous, il était seulement demandé de s'abstenir de toute prise de substance psychoactive durant les trois semaines précédant l'évaluation.
Celle-ci a été réalisée par SPECT tomographie, à l'aide d'un radioligand se fixant aux transporteurs de la sérotonine. Une densité de fixation, calculée comme étant le rapport entre fixation du ligand dans une région cérébrale donnée et fixation de ce ligand dans une région de référence, le cervelet, a été calculée.
En considérant globalement toutes les régions cérébrales analysées, aucun écart n'a pu être mis en évidence entre groupe contrôle et consommateurs modérés. Et parmi les gros consommateurs, seules les femmes présentent une fixation du ligand significativement plus faible que les sujets contrôles. Enfin, chez les ex-consommatrices d'ecstasy, la densité des transporteurs paraît plus élevée que chez les gros consommateurs (masculins) et comparable aux ratios observés chez les contrôles.
Une toxicité sérotoninergique
Les auteurs tirent trois notions de ces résultats. Premièrement, une toxicité sérotoninergique se confirme, au moins chez les gros consommateurs. Deuxièmement, les femmes seraient plus susceptibles que les hommes aux effets du MDMA. Troisièmement, ces effets seraient réversibles.
En fait, ces notions paraissent fragiles. Un éditorial signé par George Ricaurte et Una McCann, de l'université Johns Hopkins, se livre même à une critique en règle de l'étude. Ils avancent notamment que, lorsqu'on exclut les sujets présentant des symptômes dépressifs, l'effectif féminin est réduit à quatre dans le groupe MDMA modéré, cinq dans le groupe ex-MDMA et six dans le groupe contrôle.
Les auteurs néerlandais affirment que l'exclusion des sujets dépressifs ne modifie pas les résultats. L'effectif sur lequel ils reposent devient néanmoins extrêmement limité. L'auteur de l'éditorial émet par ailleurs quelques doutes sur le recours à la SPECT tomographie pour mesurer la densité des transporteurs de sérotonine dans le cortex cérébral et critique le choix du cervelet comme région de référence, puisqu'il contient des axones contenant eux-mêmes des transporteurs, susceptibles d'être affectés par la prise de MDMA.
Bref, « l'effectif et la méthodologie limitent la confiance qu'il est possible d'accorder aux notions de susceptibilité variable entre sexes, et de réversibilité. Des études plus larges, conduites dans les deux sexes chez des personnes indemnes de toute affection psychiatrique en rapport avec la séronine sont nécessaires ».
L. Reneman et coll. « Lancet 2001 » ; 358: 1864-1869.
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