Dominique Delfieu est médecin généraliste à Paris dans le XVIIIe arrondissement. Il est aussi attaché au service d'oncologie de l'hôpital Saint-Louis de Paris. Malgré les accablantes contraintes réglementaires qu'il subit quotidiennement, il témoigne de ce qui reste de son plaisir à soigner.
Le Généraliste : Avez-vous aujourd'hui encore du plaisir à soigner ?
Dr Dominique Delfieu : Le Dr Jean-Paul Hamon, président de l'Union Généraliste vient récemment de déclarer qu'il y a eu deux fois plus de médecins qui se sont suicidés ces derniers mois qu'à France Télécom. Or personne n'a songé à demander à Roselyne Bachelot de faire cesser la politique de harcèlement administratif à leur encontre. C'est la première cause de détresse professionnelle. Cela reflète bien, à mon sens, le ressenti qu'ont aujourd'hui les médecins sur le terrain : fourbus, frustrés, désillusionnés... Pourtant dans mon cœur, si je repasse le film de mes 25 années d'installation, foncièrement je suis bien content de faire ce métier et je me suis régalé pendant ces 25 ans. En effet que représentent ces accablantes contraintes réglementaires face au plaisir que j'ai pu tirer de cette profession ?
De quoi est fait votre plaisir à soigner ?
Dr Delfieu : Ce plaisir à soigner, je le trouve dans les rituels de la consultation avec la poignée de main de l'accueil, le dialogue qui s'établit puis l'examen clinique avec la palpation du malade, puis la rédaction des prescriptions. Cette proximité, ce contact physique avec toutes sortes de gens, riches, pauvres, vieux, jeunes, gros, maigres... a toujours été pour moi source d'enrichissement intérieur et de plaisir. L'examen clinique est un temps fort de la consultation au cours duquel on peut explorer, ausculter, palper différentes parties du corps et rattacher la souffrance au schéma corporel. C'est l'un des grands privilèges du médecin sur le psychologue que de toucher ses patients pour rebrancher soma et psyché.
Que vous a apporté votre participation au dernier congrès de la Société Médicale Balint ?
Dr Delfieu : J'ai trouvé cela passionnant. J'étais pourtant naïf de ce type de formation. Mais j'ai pu découvrir que des questions que je me posais sur mon exercice, d'autres se les posaient aussi. Jusqu'à présent, je n'ai pas bénéficié de formation particulière à la relation mais je me suis beaucoup impliqué en cancérologie et accompagnement de fin de vies. J'ai beaucoup appris en discutant avec des psychologues, psychanalystes et psychiatres. L'écriture de livres* m'a sans doute aussi aidé à la réflexion sur mon exercice médical. Mais ce sont surtout mes patients et l'expérience professionnelle qui m'ont beaucoup appris sur la relation médecin patients. Une formation Balint est particulièrement utile pour les médecins qui n'ont pas fait de psychanalyse pour mieux dresser l'oreille quand c'est nécessaire.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature