La « RADIOLOGIE interventionnelle » ou, plus précisément, l'imagerie interventionnelle, guidée par les rayons X, l'échographie ou l'imagerie par résonance magnétique nucléaire, désigne les techniques qui permettent des actes à visée diagnostique, thérapeutique ou palliative. Elle associe une méthode de repérage par imagerie et un acte opératoire médico-chirurgical. Cette appellation recouvre des techniques qui se sont développées aux Etats-Unis sous l'impulsion d'Alexander Margulis depuis 1967 (1). Elles ont pris une plus grande ampleur au cours des dix dernières années. L'activité interventionnelle constitue ainsi actuellement un tournant évolutif significatif de l'imagerie et devient une activité qui peut remplacer ou compléter la chirurgie.
Une place reconnue dans les schémas régionaux.
Au terme de l'arrêté du 27 avril 2004, les techniques interventionnelles utilisant l'imagerie ont été inscrites parmi les seize volets obligatoires des schémas régionaux d'organisation sanitaire pour la période 2006-2011. Dans le domaine spécifique de la cancérologie, la chirurgie et la délivrance des traitements par les radiothérapeutes sont guidées de longue date par l'imagerie. Néanmoins, les chimiothérapies sont le plus souvent administrées par voie systémique. Les radiologues qui pratiquent l'imagerie interventionnelle ont montré que la délivrance ciblée des thérapeutiques anticancéreuses permet d'améliorer leur efficacité tout en diminuant leurs effets indésirables systémiques (2). La conjonction de la mise au point de molécules innovantes et de modes de délivrance ciblés constitue une opportunité.
A tous les stades de la maladie.
Mais, en cancérologie, la place de l'imagerie interventionnelle ne se limite pas à la délivrance in situ de traitements pharmacologiques. En effet, elle trouve sa place à toutes les phases de la maladie, du diagnostic au traitement, puis dans le cadre des soins de support ou des soins palliatifs.
Pour le diagnostic, les biopsies guidées de nombreuses tumeurs peuvent être réalisées dans le cadre de l'imagerie interventionnelle. Même pour les lymphomes, de diagnostic réputé difficile, il est admis que le diagnostic peut être réalisé à l'aide d'un pistolet à biopsie guidé par l'imagerie dans le cas des ganglions lymphatiques profonds, avec un typage précis dans 90 % des cas (3). L'expérience de l'hôpital Saint-Louis montre que ces techniques peuvent désormais être utilisées pour biopsier des adénopathies superficielles, permettant de mettre en place le traitement dans 96 % des cas, alors que la dissection chirurgicale était auparavant considérée comme le « gold standard » (4). L'efficacité de la biopsie guidée est identique lors du diagnostic initial ou en cas de récidive. Cette efficacité ne dépend pas du site de la biopsie, du volume de l'adénopathie, ni du type de pistolet à biopsie utilisé. Ainsi, la biopsie à l'aiguille guidée par l'imagerie, qui évite un geste chirurgical, doit être recommandée pour le diagnostic initial de lymphome, que les adénopathies soient profondes ou périphériques.
Pour les lésions du sein, une biopsie peut également être réalisée afin d'éviter une chirurgie et une anesthésie générale inutiles. Les lésions solides du sein sont abordées selon la même technique que les ganglions, avec un guidage échographique, et on réalise alors une microbiopsie à l'aide d'un pistolet. Les foyers de microcalcifications, détectables uniquement en mammographie, sont abordés par macrobiopsie sur une table de stéréotaxie avec un guidage par mammographie numérique. La macrobiopsie par aspiration (Mammotome) permet d'obtenir un diagnostic rapide et précis chez les patientes présentant un foyer de microcalcifications suspectes (5). En effet, une lésion classée ACR4 risque d'être un cancer dans 20 à 30 % des cas environ. Un contrôle histologique est indiqué pour éliminer les faux positifs et diminuer le nombre d'interventions chirurgicales inutiles. En cas de résultat bénin (entre 70 et 80 %, théoriquement), une surveillance sera recommandée.
Devant une lésion classée ACR5, le risque de cancer est nettement plus élevé (95 % par définition). Le diagnostic de cancer étant quasi certain, la biopsie a pour objectif de caractériser le cancer afin d'optimiser le traitement (geste chirurgical, technique du ganglion sentinelle et adaptation de la chimiothérapie).
Les techniques de radiologie interventionnelles présentent également un volet thérapeutique. La destruction des tumeurs (rénales, hépatiques ou pulmonaires) par des techniques mini-invasives permet de diminuer la morbidité du traitement en épargnant le parenchyme sain.
Par radiofréquence.
C'est le cas de l'ablation tumorale par radiofréquence, au cours de laquelle un courant est délivré dans la tumeur à l'aide d'une électrode mise en place par ponction guidée, comme pour les biopsies (6). Cette technique entraîne un échauffement tissulaire et une coagulation ciblée du tissu tumoral, incluant une marge de sécurité. Elle est également utilisable par laparoscopie.
D'autres techniques, comme les ultrasons focalisés de haute intensité (Hifu) dans le traitement du cancer de la prostate, la cryothérapie, le laser, l'alcoolisation ou la chimioembolisation, constituent autant d'approches de radiologie interventionnelle thérapeutique qui complètent les possibilités actuellement disponibles. Dans le cadre des soins de support ou des thérapeutiques palliatives, la mise en place d'endoprothèses, la réalisation de dérivations, d'une gastrostomie d'alimentation, les vertébroplasties ou l'alcoolisation (bloc coeliaque) constituent également des techniques à intégrer dans une approche globale faisant appel à des thérapeutiques combinées mises en place par des équipes multidisciplinaires.
D'après un entretien avec le Pr Eric de Kerviler, service de radiologie, hôpital Saint-Louis, Paris.
1. Margulis AR. AJR Am J Roentgenol 1967 ; 99 : 761-2.
2. Reid TR, Sze DY. Tech Vasc Interv Radiol 2002 ; 5 (3) : 177-81.
3. De Kerviler E et coll. Cancer 2000 ; 89 : 647-52.
4. De Kerviler E, et coll. Eur Radiol 2007 ;
17 (3) : 843-9.
5. Heywang-Köbrunner SH, et coll. Eur Radiol 1998 ; 8 : 377-85.
6. Brown DB. J Vasc Interv Radiol 2005 ; 16 : 597-613.
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