LA PLACE de l'image animée dans la médecine moderne est incontestable, ayant envahi presque toutes les disciplines diagnostiques. Si le cinéma a été inventé comme outil d'exploration du réel, pour confirmer la théorie du physiologiste Marey à propos du galop des chevaux, il a vite dérivé vers un usage plus créatif. La médecine utilise l'image pour scruter le réel, le cinéma pour le sublimer.
Depuis 1994, le Festival ImagéSanté du CHU de Liège tente de réconcilier les deux faces de cet art du mouvement. L'édition 2008 a vu 200 films sélectionnés, dans cinq catégories : «Mutualités, Éducation à la santé, Médical, Mif-Science, Environnement». Les membres des différents jurys de près de dix nationalités ont pu visionner des films du monde entier. Canada, République tchèque, Argentine, Suisse, Belgique, Italie étaient représentés aux côtés des ténors français du film de santé, comme Thierry Berrod (Mona Lisa Production), le CNRS ou Gédéon programmes.
Ouverture sur le vécu des patients et des soignants.
À la différence du festival du film d'Amiens, ImagéSanté n'est pas une projection d'images médicales destinées à un public de professionnels. C'est un festival ouvert à la santé dans sa plus grande acceptation : du documentaire à la fiction, de la recherche médicale à l'environnement, du vécu des patients à celui des familles ou des soignants, de la place de l'art dans la thérapie comme dans la lutte contre l'exclusion, difficile de ne pas ouvrir plus le champ ni le regard sur la vie.
Si l'on en juge par le palmarès 2008, le public apprécie cet éclectisme, car parmi les vingt films primés, on trouve effectivement à peu près toutes les dimensions de la santé, pour tous les âges.
« Guérir en nanos », un remarquable document pédagogique sur l'intérêt des nanotechnologies (Marcel Dalaise, CNRS) a brillamment utilisé les surimpressions d'images virtuelles synchronisées avec les explications des chercheurs, donnant une réalité toute particulière à l'expression «je vois ce qu'il veut dire». Dans un genre différent, « le sexe c'est la santé » (Sabrina Faetanini), disait bien, lui, ce que son titre promet. Faire l'amour souvent ferait régresser certains cancers, développe le système immunitaire, allonge l'espérance de vie. Un remède aussi gratuit qu'apprécié. Pas étonnant que les Mutualités, l'équivalent belge de nos mutuelles, l'ait primé à leur tour.
Les coups de coeur sont allés à « Entre les deux la vie » de Valérie Winckler, et « Déroutes et parcours » de Myriam Fougère, 1er et 2e prix « Éducation pour la santé ». Entre les deux, la vie tente de capter l'indicible des premiers instants comme des derniers, à travers la concordance des souffles, des regards, des premiers ou derniers contacts. Déroutes et parcours, c'est la pulsion de vie qui vient secouer des femmes atteintes par un cancer du sein. La réalisatrice canadienne joue de l'enchevêtrement magique de leurs paroles, de leurs corps baignés dans l'eau glacée et de leurs productions d'art-thérapie pour donner à son film une portée universelle.
Confidentiel en France, le travail de réalisateurs intéressés par le monde de la santé l'est beaucoup moins à l'étranger. En dehors de Liège, il existe plusieurs festivals de films de santé de renommée internationale (Cordoba en Argentine, Badajoz en Espagne, Techfilm en République tchèque). Le chirurgien Philippe Kohl, organisateur d'ImagéSanté, a su porter l'édition belge au tout premier plan européen. Sans rien devoir à Urgences, Nip/Tuck ou Grey's Anatomy.
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