Un vaccin prometteur chez la souris

Du chou antivariole

Publié le 10/04/2007
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DÉTOURNER la machinerie de biosynthèse protéique des plantes pour lui faire produire des molécules d'intérêt thérapeutique n'est pas une idée nouvelle. Cependant, la possibilité d'utiliser cette stratégie afin d'obtenir des protéines virales immunogènes n'était pas encore clairement démontrée. Des résultats intéressants avaient été obtenus avec un modèle de tomates exprimant des protéines du sras (« le Quotidien » n° 7770 du 14 juin 2005), mais l'universalité de la méthode devait être confirmée. C'est chose faite : Golovkin et coll. sont en effet parvenus à produire des plantes qui synthétisent un antigène viral capable de conférer aux souris une protection efficace contre l'infection par le virus de la variole.

Brassica oleracea.

L'équipe de recherche américaine a fondé son travail sur l'introduction du gène B5R du virus de la variole dans le génome d'une variété de chou (Brassica oleracea) et dans celui de plants de tabac. Ce gène code pour une glycoprotéine membranaire reconnue par les anticorps présents dans le sérum des individus qui ont été infecté par le virus de la variole. Les chercheurs ont utilisé des constructions génétiques conduisant à une synthèse soutenue de l'antigène sous une forme soluble facile à purifier.

La protéine virale ainsi produite a été utilisée pour immuniser des souris. Les animaux ont reçu trois injections intramusculaires de l'antigène purifié avant d'être exposés à une dose létale du virus de la variole : toutes les souris testées ont survécu à l'infection. Les animaux ont accusé une perte de poids importante (de l'ordre de 30 %) dans la semaine suivant l'infection, mais une récupération du poids de base a été obtenue en moins de deux semaines.

Les chercheurs ont, par ailleurs, testé l'efficacité vaccinale d'une administration de la protéine recombinante par voie intranasale et parentérale. Chez la souris et le cochon nain, ces deux méthodes conduisent à la mise en place d'une puissante réponse immunitaire se traduisant par l'apparition d'anticorps spécifiques dans le sérum des animaux. L'administration parentérale est cependant plus efficace que l'administration intranasale.

La voie orale ne suffit pas.

Dans un dernier temps, les chercheurs ont voulu tester l'efficacité d'une administration de l'antigène par voie orale. Le chou étant un légume comestible, l'espoir de Golovkin et coll. était que la consommation de la plante génétiquement modifiée suffise à conférer une immunité protectrice. Dans ce cas, il serait possible de se dispenser de l'étape fastidieuse et coûteuse de purification de la protéine. Malheureusement, dans les deux modèles animaux testés, aucune immunisation n'a pu être obtenue par voie orale.

Quoi qu'il en soit, les travaux de Golovkin et coll. prouvent qu'il est possible de produire des protéines recombinantes virales immunogènes dans un système d'expression végétal. L'immunité protectrice induite par l'antigène recombinant est semblable à celle observée avec le vaccin contre la variole classique, composé d'une version vivante atténuée du virus de la variole. La protéine recombinante a cependant de grandes chances de provoquer moins d'effets secondaires que le virus atténué. De plus, en ajoutant les gènes à d'autres antigènes propres au virus de la variole dans les plants de chou et de tabac qui expriment maintenant B5R, il sera certainement possible d'obtenir un niveau de protection antivirale encore plus élevé.

Golovkin M et coll. « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée.

> ELODIE BIET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8144