« Médecine de proximité », le terme est nouveau... Comment définissez-vous le périmètre de cette mission que vous a confié le président Sarkozy ?
J’ai quelques idées, mais c’est précisément l’un des premiers points sur lesquels je souhaite entendre mes interlocuteurs. Car je ne suis pas sûre qu’entre les uns et les autres, on parle toujours de la même chose. Que cela soit en termes d’appréciation du besoin, – que doit-on satisfaire ? – mais aussi de définition des champs d’activité concernés. Quand un certain nombre d’organisations me disent que la médecine de proximité ne concerne pas que la médecine générale, mais aussi un certain nombre de spécialités, notamment cliniques, je trouve que c’est réel. C’est même essentiel si on veut vraiment se projeter sur l’avenir. Ce qui va m’intéresser, c’est d’entendre aussi mes interlocuteurs évoquer s’ils associent dans cette médecine de proximité, et jusqu’à quel niveau, d’autres professions de santé, et si oui, lesquelles.
Doit-on davantage parler de coordination entre ces acteurs ?
Je pense qu’aujourd’hui tout le monde est d’accord pour dire que cette coordination doit exister. Le problème est de savoir la forme qu’elle doit prendre, et par qui elle doit être exercée. Qu’entend-on par coordination ? Est-ce quelque chose qui doit être relativement léger ou est-ce quelque chose qui intègre une logistique plus conséquente ? Mais revenons à la médecine de proximité dont la définition peut, en effet, être large et je pense qu’il est essentiel de savoir, si on parle tous de la même chose.
Comment comptez-vous procéder ?
J’entends à la fois ne pas court-circuiter les institutionnels. Ils ont des choses à dires, ils sont représentatifs. Il est légitime que leur expression soit entendue. J’entends leur demander des contributions écrites, je crois beaucoup à ce que les choses se fassent de façon transparente et engagée. C’est un des points importants. La deuxième chose, c’est de reprendre le travail qui a déjà été fait à travers un certain nombre de rapports de commissions ou groupes, de façon à en faire la synthèse et savoir plus précisément ce qui peut en être tiré. Enfin, j’entends aussi effectuer des déplacements en province pour aller rencontrer sur le terrain mes confrères médecins bien sûr, mais pas qu’eux. Les professions paramédicales qui interagissent avec les médecins, les élus, qui ont manifesté des inquiétudes, et les patients qui se posent aujourd’hui beaucoup de questions. J’envisage aussi la possibilité que ces rencontres ne prennent pas forcément la même forme partout.
Etats généraux de l’offre de soins, rapport Vallancien, mission Legmann… Où vous situez-vous dans cette floraison de missions de réflexion sur la médecine ?
Je n’ai absolument pas vocation à réécrire des choses qui ont déjà été faites. Il y a, peut-être, en revanche, un point sur lequel je peux agir : essayer de leur donner une dimension plus large. La mission Legmann avait dans ses attributions un certain nombre de choses, mais pas les modes de rémunération. Moi, oui. J’entends écouter les propositions et étudier les différentes formes de rémunération possibles. Parce qu’il va bien falloir réfléchir à savoir comment, alors qu’on parle beaucoup de formes pluridisciplinaires de l’exercice, on va payer tout ça. Je pense qu’en plus il faut vraiment se projeter dans un avenir qui n’est pas seulement celui du prochain PLFSS et du règlement conventionnel, même si on ne peut pas les évacuer parce qu’ils sont la porte d’entrée. Quant à la méthode, il ne s’agit pas d’une énième commission, puisque c’est une mission intuitu personae qui m’a été confiée et qui va s’organiser autour des auditions et des rencontres, des réunions et des déplacements que je vais faire. Je n’ai ni un groupe de travail, ni une commission, et je dispose de six mois, ce qui n’est pas très long non plus.
L’annonce par le chef de l’Etat du C à 23 euros pour les généralistes ne semble pas avoir résolu le mal-être d’une profession qui se plaint de ne plus avoir suffisamment de temps médical et qui s’inquiète aussi de voir son identité libérale menacée…
J’entends complètement leur malaise. L’expression d’une demande tarifaire est aussi une aspiration à voir reconnue la valeur de son activité. De plus, aujourd’hui, quand vous interrogez les médecins, un certain nombre se reconnaissent dans cette qualification libérale, et il existe toute une autre catégorie qui aspire à ce qu’elle ne perdure pas. C’est pourquoi je tiens à dire qu’il ne s’agit pas d’opposer une catégorie à l’autre. Je crois qu’il faut faire coexister le paiement à l’acte qui a toute sa raison d’être avec d’autres formes de rémunération, d’autres formes d’activité, voir aussi ce que les professions médicales acceptent de déléguer à d’autres… Ce sont sur toutes ces questions que j’entends consulter et écouter, en espèrant que mes interlocuteurs seront porteurs de propositions.
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