La douleur est un symptôme fréquent en cancérologie . Le cancer peut ne pas être douloureux d'emblée, en revanche en cas d'extension loco-régionale, de métastases ou de récidive 50 à 60 % des patients souffrent et cette proportion atteint 80 % à 90 % au stade avancé ou terminal de leur maladie.
Dans près de 80 % des cas la douleur est en relation directe avec la tumeur primitive ou ses métastases, dans 20 % elle est la conséquences des gestes à visée diagnostiques et/ou des traitements (radiothérapie, chimiothérapie, chirurgie) et dans un petit nombre de cas, elle est sans rapport avec le cancer ou son traitement (lombalgies, douleurs ostéoporotiques...).
A l'heure actuelle, il existe de nombreux moyens pour prendre en charge les douleurs liées au cancer ou consécutives à son traitement. En suivant les recommandations (OMS, ANAES), 80 % des patients pourraient être soulagés de manière efficace avec des traitements simples et sans effets secondaires notables.
Pour obtenir ce résultat une évaluation initiale de la douleur et de son retentissement en terme de pertes de capacité fonctionnelle, d'autonomie et de qualité de vie et des réévaluations régulières au cours du suivi du patient sont indispensables.
Or actuellement la douleur est encore insuffisamment prise en compte, sous évaluée par les soignants (le manque de temps et de disponibilité peuvent être des freins à une bonne évaluation de la douleur) et dans 10 à 20 % des cas les patients cancéreux ne se plaignent pas spontanément ce qui est un des obstacles à leur prise en charge. Divers facteurs conduisent les patients à ne pas exprimer leur douleur : l'idée que la douleur est inévitable ou que le traitement doit être réservé aux douleurs intolérables, la crainte des effets secondaires et de la dépendance aux opioïdes...
Evaluation globale de la douleur
La première chose à demander systématiquement à un patient cancéreux est s'il souffre, le second point est de procéder à une évaluation et à une analyse précises de la douleur qui permettront de choisir la stratégie thérapeutique en fonction de son étiologie (douleur liée au cancer, aux traitements, métastases osseuses entraînant un risque fracturaire...), de son intensité et des mécanismes physiopathologiques impliqués, sachant par ailleurs que les patients parlent de la douleur qui les gêne le plus alors qu'ils ont plusieurs douleurs de mécanismes différents.
Le choix des traitements symptomatiques découle pour une large part du mécanisme présumé de la douleur : la douleur de type nociceptive répond bien aux antalgiques majeurs notamment morphiniques alors que les douleurs neuropathiques (douleurs séquellaires liées aux traitements et non au cancer , infiltration d'un tronc nerveux par le processus tumoral...) sont peu sensibles aux antalgiques et relèvent d'autres traitements (antidépresseurs...).
Evaluation systématique de l'intensité de la douleur
Après avoir déterminé le mécanisme de la douleur, le lien de causalité éventuel avec le cancer, l'analyse de ses caractéristiques (douleur spontanée ou provoquée, continue ou paroxystique, variabilité dans la journée, réveils nocturnes, retentissement sur la vie quotidienne et socio professionnelle...) et l'évaluation de son intensité oriente le choix du traitement antalgique.
Les échelles d'évaluation de la douleur et de son soulagement sont des outils sensibles, valides, reproductibles qui facilitent la communication avec la patient en lui montrant que sa plainte est prise en compte, qui permettent aux différents membres de l'équipe soignante d'utiliser des critères communs ce qui facilite les prises de décision homogènes au sein de l'équipe, permettent la transmission de l'information entre le patient et les soignants, information susceptible de rester dans le dossier médical et de servir de référence.
Au terme de l'évaluation initiale , il convient alors d'expliquer au patient les modalités thérapeutiques (codifiées par l'OMS), les résultats attendus et les effets indésirables possibles. Idéalement le traitement devrait permettre de soulager de manière efficace sans effets secondaires les douleurs paroxystiques spontanées, les douleurs liées au mouvement et les douleurs de fond.
En pratique, le thérapeute devra définir des objectifs réalistes qui seront atteints par étapes : soulager la douleur la nuit puis au repos, contrôler les douleurs liées aux mouvements, permettre la reprise des activités quotidiennes .
Les patients devront être informés que dans certaines situations, une phase d'équilibration initiale du traitement est nécessaire et qu'un effet indésirable nécessitant des ajustements pourra allonger cette période d'équilibration.
D'après un entretien avec le Pr Thierry Delorme, institut Curie, Paris
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