PRATIQUE
Pas de fièvre, pas de pneumopéritoine
Il n'y a ni fièvre, ni troubles du transit, ni vomissements, ni météorisme, ni troubles urinaires . L'examen réveille la douleur, les bruits hydroaériques sont conservés. Le toucher rectal est normal. On évoque une appendicite, une cholécystite, une perforation d'organe creux (sous coloscopie ?).
Les clichés sans préparation de l'abdomen et des coupoles ne montrent pas de pneumopéritoine, l'échographie innocente la vésicule, le foie et les voies biliaires, mais semble reconnaître un épaississement des parois intestinales, un scanner confirme l'absence d'épanchement péritonéal. Biologiquement, on trouve un taux de prothrombine à 38 % et une hyperleucocytose à 21 000.
Coelioscopie exploratrice
Devant la persistance de cette douleur de la fosse iliaque droite, l'existence d'une douleur provoquée et l'apparition d'une ébauche de défense, on intervient le 12 octobre 2002 avec le diagnostic vraisemblable d'appendicite et l'on choisit de faire une coelioscopie.
Celle-ci est réalisée par insufflation de CO2 et introduction de la caméra par le trocart ombilical (10 mm), deux trocarts de 5 mm étant placés dans la fosse iliaque gauche et l'hypochondre droit, et un trocart de 12 mm dans l'hypocondre gauche. Il existe un petit épanchement trouble dans la grande cavité, mais l'appendice est sain. L'exploration permet de retrouver une zone manifestement infectée sous le transverse et l'on pense d'abord à une perforation colique au cours de la coloscopie mais la mobilisation du grêle fait apparaître un diverticule de Meckel (DM) infecté, nécrotique et préperforatif. Il est réséqué par deux applications de pince GIA puis extrait à l'aide d'un sac. L'anatomopathologie confirme qu'il s'agit d'un diverticule de Meckel perforé, gangrené, abcédé. Il n'a pas été vu de métaplasie fundique mais on ne peut exclure qu'elle ne soit plus visible, détruite par la nécrose gangreneuse.
Les suites sont simples et le malade quitte l'hôpital le 16 octobre après reprise des anticoagulants oraux.
Revu le 18 novembre 2002, il est en excellent état général, sans aucun trouble digestif ni douleurs.
Une anomalie congénitale
Le diverticule décrit par Meckel en 1809, assez fréquent (1 à 2 % de la population), est une anomalie congénitale liée à la persistance du canal vitellin au niveau de son segment intestinal et des vaisseaux omphalomésentériques. Il est unique, situé sur le grêle distal au niveau de la terminaison de l'artère mésentérique supérieure, implanté sur le bord antimésentérique du grêle, le plus souvent libre mais parfois relié à l'ombilic par un canal fibreux ou vasculaire. Si sa longueur et son calibre varient, sa structure histologique est en général celle de l'iléon avec ses quatre tuniques, mais la muqueuse peut être le siège d'hétérotopies pancréatiques et surtout gastriques (cellules fundiques chlorhydrosecrétantes). On les rencontre essentiellement dans les diverticules pathologiques, mais l'infection peut les détruire comme cela a été évoqué dans cette observation.
Complications une fois sur deux
On considère que moins d'un diverticule de Meckel sur deux se complique et fait donc parler de lui, mais ces complications surviennent en règle dans la petite enfance, et plus chez le garçon, alors que la distribution est à peu près égale dans les deux sexes.
Les diverticulites, dont cette observation est un exemple, est une des complications les plus habituelles. Le diagnostic évoqué est presque toujours celui d'appendicite et d'ailleurs les lésions anatomiques sont les mêmes (diverticulite catarrhale, suppurée, gangreneuse). La perforation y est fréquente et alors souvent couverte (ici par le côlon transverse), réalisant un abcès mésocliaque. Il faut donc toujours rechercher un diverticule de Meckel devant un tableau appendiculaire avec appendice sain. La méconnaissance de ce dogme a conduit à réopérer des « appendicites » quatre jours après l'appendicectomie.
Une hémorragie intestinale parfois grave
Le diverticule de Meckel peut être le siège d'un ulcère peptique lié à la présence sur sa muqueuse d'une hétérotopie gastrique. Sa complication la plus fréquente est le saignement, sous forme de rectorragies d'abondance variable, souvent répétitives, pouvant mettre en jeu le pronostic vital. Le diagnostic est difficile (surtout si une appendicectomie antérieure laisse supposer que le diverticule de Meckel a été recherché et traité), reposant sur la négativité de l'endoscopie digestive, sur la scintigraphie au technétium dont la sensibilité et la spécificité sont faibles, ou sur l'artériographie mésentérique. Après avoir éliminé une ulcération thermométrique ou un trouble de la coagulation, si les endoscopies sont négatives, on est en droit de proposer une clioscopie exploratrice.
Invagination, tumeurs
Parmi les autres complications possibles, il faut citer l' invagination intestinale aiguë qui se rencontre surtout chez l'enfant de moins de 2 ans, ou plus rarement des occlusions sur bride congénitale ou un volvulus sur l'axe vasculaire.
Enfin, il faut citer la possibilité de développement de tumeurs, bénignes ou malignes, sur diverticule de Meckel, et notamment de GIST (GastroIntestinal Stromal Tumours) qui se révèlent, en règle générale, à l'occasion d'une complication (péritonite par perforation), et c'est l'histologie qui trouve le diverticule de Meckel sur la pièce de résection.
Le traitement peut se faire par abord laparotomique ou laparoscopique et enlever soit le diverticule et sa base, soit un segment de grêle de part et d'autre du diverticule de Meckel, la continuité étant rétablie par suture manuelle ou mécanique, comme dans l'observation rapportée ici.
Quant à la conduite à tenir devant un diverticule de Meckel non compliqué de découverte systématique au cours d'un autre geste, elle est discutée mais la majorité des auteurs est favorable à sa résection.
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