TROIS MOIS exactement après l'annonce du plan de relance du dossier médical personnel (DMP) par Roselyne Bachelot (« le Quotidien » du 18 juin), le projet reste de fait toujours en stand-by . En effet, le ministère de la Santé n'a pas encore nommé le nouveau capitaine appelé à tenir le gouvernail de la future agence des systèmes d'information de santé partagés (ASIP).
Le rapport de la mission Gagneux, rendu à la ministre au printemps, lui avait proposé de créer l'ASIP en fusionnant trois structures existantes : les groupements d'intérêt public « DMP » et « Cartes de professionnels de santé » (GIP-DMP et GIP-CPS), ainsi que la partie « interopérabilité » du groupement pour la modernisation du système d'information hospitalier (GIMSIH). Dans l'entourage de Roselyne Bachelot, on assurait en milieu de semaine que la nomination du futur directeur de l'ASIP était «en cours». Dans le microcosme de l'informatique médicale, on murmure en revanche qu'un vent contraire souffle à Bercy, où l'ASIP serait perçue comme «une nouvelle usine à gaz», non indispensable et de toute façon un peu longue à installer.
La « short list ».
En attendant, les rumeurs vont quand même bon train sur l'identité du futur pilote de l'ASIP, d'autant qu'un cabinet de chasseur de têtes sélectionné par appel d'offres (« le Quotidien » du 10 juillet) a procédé à une série d'entretiens. Jacques Sauret, directeur du GIP-DMP depuis 2006, ne ferait pas partie des candidats pressentis. Joint par « le Quotidien », l'intéressé s'abstient pour sa part de tout commentaire, mais la relance du DMP selon Roselyne Bachelot laissait en tout cas présager un changement de têtes pour marquer une vraie rupture dans la gouvernance du projet.
Reste une « short list » de noms qui circulent et dont les cotes respectives ont parfois subi beaucoup d'aléas ces dernières semaines. Même si la discrétion est de mise en la matière avant toute nomination, on compte parmi les candidats approchés, selon des sources concordantes : Michel Gagneux (inspecteur général des affaires sociales, qui avait coordonné la mission de relance du DMP), Denis Richard (chef de la mission DMP à la Caisse nationale d'assurance-maladie), Marthe Wehrung (directrice du GIP-CPS) ou encore Jean-Yves Robin (médecin et directeur général de Santeos, l'hébergeur choisi pour le dossier pharmaceutique et présent dans les expérimentations du DMP en 2006). Une liste hétérogène et sans doute pas exhaustive. Le profil d'énarque de Michel Gagneux, tout comme celui d'industriel de Jean-Yves Robin, peut effrayer les professionnels de santé et les actuels concurrents de Santeos sur le terrain.
Au-delà de cette nomination qui reste en suspens, le futur pilote des systèmes d'information partagés, et du DMP en particulier, aura fort à faire pour remobiliser les troupes. Le problème, confie un expert du secteur, c'est que «les gens s'en vont», pensant qu' «il faudra du temps avant que la colle prenne» entre le GIP-DMP, le GIP-CPS et le GIMSIH aux «cultures différentes». Résultat : le GIMSIH a enregistré quatre départs cet été et le GIP-DMP n'a plus à ce jour que 55 postes pourvus sur les 65 budgétés. Marie-Laure Micoud, l'adjointe de Jacques Sauret, a plié bagages pour rejoindre l'Ordre national des pharmaciens, promoteur du dossier pharmaceutique. Et le GIP-DMP n'a plus de directeur juridique depuis le mois d'avril. «Si ça continue, on va fusionner des coquilles vides», ironise un observateur.
Du côté des industriels, le moral n'est pas non plus au beau fixe, tant qu'il n'y aura pas l'assurance d'un financement conséquent et durable. «Les plates-formes d'hébergement sont actuellement sous-financées, on y travaille depuis quatre ans: on commence à ronger les os!», souligne Tudy Bernier chez l'opérateur France Télécom. Il rappelle en outre que les déboires du DMP ont conduit maints responsables de projets de consortiums à «s'écarter de la voie» quand ils n'ont pas «été écartés» tout court, faute de retombées probantes. Bref, «le DMP ne fait plus rêver! Il va falloir investir. Or le financement n'est pas certain et la conjoncture économique est mauvaise», résume Tudy Bernier.
Quant au dernier rapport de la Cour des comptes, qui suggère au gouvernement de reporter purement et simplement la distribution du 1,5 milliard d'euros de crédits prévus pour les systèmes d'information dans le cadre du plan Hôpital 2012, il a de quoi alimenter aussi la morosité des industriels impliqués dans le secteur…
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