Tous contre la douleur

Distinguer les différents types de douleurs

Publié le 19/02/2003
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Le temps de la médecine

Quelques clefs d'interprétation facilitent le décryptage de ce symptôme complexe et permettent de distinguer quelques grandes catégories à l'expression sémiologique différente.

En pratique, l'intrication des différents types de douleurs est fréquente (douleurs mixtes). C'est pourquoi toute douleur doit être analysée comme étant composée d'une ou plusieurs douleurs de base : nociceptive, neuropathique, fonctionnelle ou psychogène.
Topographie précise, tonalité, horaire, facteurs d'amélioration et d'aggravation sont autant d'éléments à examiner attentivement.

• Douleur nociceptive
Elle résulte d'une stimulation directe des nocicepteurs et suppose l'intégrité du système nerveux. Elle est peu modifiée par la thymie ou par les phénomènes de distraction. Sa tonalité est variable mais évoque dégât tissulaire, écrasement, broiement, arrachement, plaie à vif, etc.
La douleur nociceptive peut avoir un caractère mécanique (elle est augmentée par l'activité, diminuée par le repos), inflammatoire (augmentée par le repos), ou mixte (permanente).
Elle peut être superficielle et alors assez précise (maximum de précision au visage et aux mains), sourde, imprécise, étendue, dépassant la structure responsable dans les douleurs viscérales. Dans ces dernières, sa localisation peut être floue. Elle peut aussi être rapportée (douleur de l'infarctus au bras gauche par exemple), correspondant à la région somatique liée aux segments spinaux innervant le viscère stimulé.

• Douleur neuropathique
Les douleurs neuropathiques sont liées à des lésions des voies (tronc nerveux, plexus, racines rachidiennes, nerfs crâniens à composante sensitive) ou centres nerveux (moelle épinière, tronc cérébral, thalamus, cortex), impliqués dans la transmission et l'intégration des activités nerveuses sensitives issues de la périphérie.
La lésion des afférences modifie l'excitabilité des neurones des relais spinaux et supraspinaux ainsi que l'efficacité des systèmes inhibiteurs. Tout se passe alors comme s'il existait une altération des mécanismes neurophysiologiques de la modulation de la douleur.
Les lésions en cause peuvent être d'origine diverses : traumatiques ou compressives, vasculaires, infectieuses, inflammatoires, métaboliques, toxiques.
La sémiologie des douleurs neuropathiques est caractérisée par l'association d'une topographie systématisée (territoire d'innervation sensitive dont dépend la structure nerveuse lésée), d'une composante continue à type de brûlure et d'une composante paroxystique, souvent perçue comme des « décharges électriques ». Des dysesthésies, paresthésies ou sensations d'anesthésie locale sont également présentes dans le même territoire.
La douleur neuropathique est perçue même en l'absence de toute stimulation nociceptive et lors d'une stimulation habituellement non algogène (allodynie). Cette allodynie est facilement mise en évidence à l'examen, tout comme l'hyperalgésie (réponse exagérée à une stimulation normalement douloureuse), ou l'hyperpathie (réponse retardée et exagérée à un stimulus le plus souvent répétitif).
Les douleurs neuropathiques sont en général beaucoup plus fluctuantes que les douleurs nociceptives, beaucoup plus sensibles aux variations de l'attention et de la thymie.

• Douleur mixte
De nombreuses pathologies, en particulier les néoplasies, génèrent les deux types de mécanismes douloureux. Le tableau clinique est alors plus complexe, avec une tendance au masquage de la composante neurogène par la composante nociceptive.
D'où la nécessité, pour décrypter ces douleurs mixtes souvent évolutives (en fonction de la maladie causale), de réinterroger fréquemment les patients sur l'intensité mais aussi sur les caractéristiques de leurs douleurs en cours de traitement.

• Douleur fonctionnelle
Seul un bilan clinique et paraclinique négatif permet de qualifier une douleur d'idiopathique ou de fonctionnelle. Pour qualifier une douleur de psychogène, un dysfonctionnement psychique doit être mis en évidence (conversion hystérique, trouble dépressif, hypochondrie, etc.).
Ce diagnostic ne doit jamais constituer une fin de non recevoir des patients. Même fonctionnelle, une douleur reste une souffrance.

Dr C. M.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7278