LE NOUVEAU VARIANT de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (nvMCJ), observé chez les personnes infectées par le prion de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB, ou maladie de la vache folle) via la consommation de bœuf contaminé, se distingue sur les plans clinique et moléculaire de la forme classique, représentée en majorité par la forme sporadique (sMCJ). Le nvMCJ touche spécifiquement l'adulte jeune (en moyenne de 27 ans) et se manifeste initialement par des symptômes psychiatriques et comportementaux. La forme sporadique, exceptionnelle avant 40 ans, a un pic d'incidence après 70 ans, et se manifeste par un syndrome démentiel et des signes neurologiques. Tandis que le nvMCJ est associé à un prion pathologique de type 4, la forme classique est associée aux types 1, 2 et 3.
L'équipe de John Collinge (University College of London) a étudié chez la souris comment le polymorphisme en position 129 du gène du prion normal influence la maladie après exposition au prion de l'ESB ou au prion du nvMCJ.
On sait que le gène du prion humain peut coder une valine (V) ou une méthionine (M) en position 129 de la protéine. Chacun possède deux copies du gène et peut donc avoir un génotype MM, MV ou VV.
nvMCJ et sujets méthionine/méthionine au codon 129.
A ce jour, tous les cas de nvMCJ ne sont survenus que chez des individus MM, un génotype porté par 40 % de la population seulement. La seule exception récente est un patient MV, qui semble avoir contracté le prion du nvMCJ après transfusion sanguine.
Leur étude a été menée chez des souris génétiquement modifiées de façon à exprimer la version humaine du prion normal. Ces souris MM ou VV ont été infectées par le prion de l'ESB ou le prion du nvMCJ.
Résultat : la transmission et la forme de la maladie à prion dépendent du génotype de la souris.
Chez les souris VV, les prions ESB ou nvMCJ ne se propagent pas efficacement, aussi bien sur un premier passage (barrière de transmission primaire) que - de façon remarquable - sur un second passage (de souris à souris, démontrant une persistance de barrière de transmission) ; ce qui contraste nettement avec ce que l'on observe chez les souris MM. Lorsque l'infection est détectée, elle s'associe à une forme différente de maladie neuropathologique liée à un nouveau type 5 de prion anormal. Cela n'a pas encore été observé chez l'homme, et les chercheurs ne savent pas quelle forme de maladie pourrait découler de ce prion.
Les souris MM développent une maladie qui ressemble soit au nvMCJ humaine (type 4), soit à la forme sporadique humaine de la MCJ (type 2).
Ce travail suggère, selon les chercheurs, que les prions de type 4, exclusivement associés au nvMCJ, ne peuvent se propager que chez les personnes exprimant la méthionine (M) au codon 129. Le prion normal contenant la valine (V) est incapable d'adopter la forme moléculaire particulière qui caractérise le type 4.
Une forme inédite à définir ?
Ainsi, les personnes VV (10 % de la population) ne semblent pas pouvoir développer le nvMCJ ; toutefois, elles pourraient développer une forme inédite de maladie prion qui reste à définir.
Par ailleurs, le nombre de cas sporadiques de MCJ s'est élevé ces dernières années, ce que les experts ont imputé en grande partie à une meilleure surveillance. Cette nouvelle étude suggère que certains cas pourraient être dus à l'ESB.
« L'implication de ce travail est qu'il ne faut pas s'attendre à observer une seule forme de maladie liée à l'ESB dans la population britannique », a commenté à la presse le Dr Jonathan Wadsworth, premier signataire de l'étude. « Ces études de souris nous procurent des indices essentiels sur le comportement des prions et sur la façon dont ils semblent se modifier et s'adapter en fonction de la constitution génétique de l'individu qu'ils infectent », ajoute pour sa part John Collinge. « Nous sommes toujours prudents quand il s'agit d'extrapoler les résultats à l'homme, mais notre travail suggère fortement qu'il ne faut pas penser qu'un seul profil génétique confère une vulnérabilité à l'infection ESB. »
« Pour l'instant, il n'est pas possible de dire comment cela devrait changer les estimations du nombre de cas à venir, mais nos résultats plaident pour que nous prenions des mesures afin d'établir un système plus sophistiqué de catégorisation de la maladie, cela afin de ne pas prendre une infection liée à l'ESB pour une forme sporadique de la MCJ. »
« Sciencexpress », 11 novembre 2004.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature