« Mettez-vous sur un pied, puis lancez-vous la balle... Sans quittez votre point d’appui ! » Pas facile ! Cet après-midi d’automne, ils sont sept, un homme et six femmes, qui suivent une séance de gym d’entretien dans le cadre du réseau lyonnais Dialogs, dédié à la prise en charge du diabète de type 2. Educatrice sportive du réseau, Florence Odin enchaîne d’une voix joueuse échauffements et jeux d’équilibre. Avant la gymn, quelques-uns ont participé au groupe de marche... Après une pause thé, presque tous iront à la gym aquatique.
« Je n’ai pas droit à l’aquagym en ce moment, regrette Danièle, une participante. Mais mon lundi, c’est sacré. Ça me fait tellement du bien de me bouger un peu... Et ça me permet de rencontrer d’autres patients, de parler de nos problèmes et même d’en rire ! » En 2007, la proportion de sujets sédentaires dans le réseau avait baissé de 52 à 39%, alors que tous les résultats biologiques ou cardiaques de la plupart des patients s’étaient améliorés (voir encadré). L’exercice sportif, au cœur de la prise en charge de Dialogs, est aussi déterminant physiquement que psychologiquement. Il optimise la dynamique du réseau.
« Chaque malade signe un contrat pour adhérer à l’association, rappelle le Dr Christine Martin, diabétologue et médecin coordinateur de Dialogs. Il s’engage. » Le patient fait ensuite un bilan d’entrée avec son généraliste, puis il remplit avec lui une fiche d’objectifs pour un an : perte de poids, activité physique, arrêt du tabac... Avant la consultation de bilan, un an plus tard. Entre temps, il est aussi conseillé de suivre l’une des réunions pédagogiques gratuites (sur l’alimentation, la glycémie ou les médicaments...), organisée dans chaque secteur du réseau, dans le Rhône, une partie de l’Isère et de l’Ain. Le réseau prend aussi en charge d’autres consultations annuelles : deux pour les soins dentaires, une à 3 de diététique et une, minimum, de podologie. « Quelque 10 000 amputations par an en France sont dues au diabète, avance Christine Deschaseaux, podologue dans le réseau. Dès l’apparition d’une insensibilité du pied, il faut être vigilant. Habituellement, en cabinet, je vois plutôt le patient diabétique en première intention. Avec le réseau, il arrive avec une prescription, accompagné par une fiche Internet sur laquelle j’inscris à mon tour des informations après le soin. »
Pour le Pr Riou, diabétologue et président de Dialogs, « cette pluridisciplinarité, avec un dossier médical partagé informatisé, est une des grandes forces du réseau. Tous les professionnels, et en particulier le médecin traitant, au cœur du réseau, peuvent être informés en permanence de l’avancement de la prise en charge des patients. » Les 121 généralistes sont en effet les pivots de ce réseau qui compte 650 patients, 365 endocrinologues, 79 pharmaciens, 12 biologistes, 35 dentistes, 50 diététiciennes, 67 infirmières et une préparatrice physique... Tous ces professionnels bénéficient d’ailleurs d’une même formation commune de trois journées. « Les journées de formation à l’entretien motivationnel, avec un coach, sont très approfondies, explique le Dr Christine Martin. Il nous donne des méthodes pour aborder le malade différemment. En valorisant, plutôt qu’en faisant la leçon. En écoutant plutôt qu’en parlant... »
Serait-ce naturel pour un généraliste ? À entendre quelques-uns des médecins du réseau, la révision ne serait pas vaine... « Cette formation m’a permis de m’améliorer, constate le Dr Roland Cézanne-Bert, de Saint-Priest (une dizaine de patients dans Dialogs). L’écoute est particulièrement importante pour ces malades qui sont souvent dans la culpabilité. » Son confrère de Villefontaine, dans l’Isère, le Dr Alain Moreau (six patients dans le réseau), apprécie lui aussi cette formation : « Ça devrait faire partie du cursus de base du médecin. L’abord global du patient, qui est le propre de notre métier, peut être potentialisé par la formation. » Le Dr Claude Maupas, de Givors (une quinzaine de patients dans Dialogs), confirme : « L’entraînement réel avec des pairs est très efficace. »
Ce que recherchaient les généralistes en entrant dans le réseau ? Un soutien pour leur patient dans « cette pathologie chronique, difficile, fréquente » et une collaboration avec d’autres professionnels. « Je me sens souvent très seul face aux décisions, explique le Dr Etienne Schaerer, de Marennes (69). J’apprécie de pouvoir partager avec des confrères spécialistes, des infirmières, des podologues, diététiciens, biologistes... Et 100% de mes patients dans le réseau sont enchantés ». Pour le Dr Christophe Icard, l’entrée dans le réseau a également permis « de donner un coup de fouet à la relation médecin patient. C’est surtout intéressant pour ces personnes qui sont dans le suivi depuis 20 ans, et qui en ont assez... Avant, ils arrivaient avec la peur de se faire engueuler... Maintenant, ils se sentent plus responsables. »
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature