Douleur et raideur
L’association douleur et raideur d’épaule est le plus fréquemment liée aux capsulopathies et tendinopathies de la coiffe des rotateurs. «Pourtant, l’arthrose d’épaule peut présenter la même symptomatologie clinique, explique le Pr Hervé Thomazeau, il s’agira donc du principal diagnostic différentiel à évoquer devant une douleur et une raideur d’épaule ne cédant pas à un traitement antalgique.» Classiquement, la symptomatologie de l’arthrose se manifeste par des douleurs survenant tout d’abord aux mouvements, ne devenant que secondairement permanentes, empêchant le patient de dormir sur le côté le plus atteint. La force est diminuée, le patient ne peut plus rien porter. Les deux épaules peuvent être atteintes, mais à des stades cliniques et radiologiques différents.
Le diagnostic sera étayé cliniquement par l’existence de craquements, notamment lors de la flexion antérieure active contrariée. La limitation de la mobilité touche tous les secteurs et plus particulièrement la rotation externe (impossibilité progressive pour le patient de se coiffer, de se brosser les dents).
Centrée ou excentrée
L’omarthrose est rarement la conséquence d’une instabilité ou de traumatisme préalables (après nécrose céphalique, par exemple). Elle se présente le plus souvent sous deux formes très stéréotypées : soit une omarthrose dite centrée, sans ascension radiographique de la tête humérale car celle-ci reste bien maintenue face à la glène par une coiffe des rotateurs intacte (fig. 1), soit une omarthrose « excentrée », conséquence ultime d’une rupture ancienne de la coiffe des rotateurs, laissant échapper la tête humérale vers le haut en appui sous-acromial (fig. 2). Les radiographies standards de l’épaule suffisent parfaitement pour retrouver les signes typiques d’arthrose : pincement articulaire, ostéocondensation, ostéophytes, voire géodes. Elles suffisent également à préciser le type centré ou non de l’omarthrose. L’imagerie complémentaire n’aura d’intérêt que pour la planification opératoire du chirurgien.
Prise en charge
La prise en charge médicale de l’arthrose d’épaule repose sur un traitement antalgique, éventuellement associé à des infiltrations endo-articulaires en cas de crise, et sur la rééducation. Mais, bien souvent, le traitement médical ne parvient plus à soulager les douleurs. Il faudra donc faire appel à la chirurgie avec la mise en place d’une prothèse.
Le type de prothèse choisi sera fonction de l’état des muscles de la coiffe des rotateurs. Si elle est intacte, une prothèse totale « anatomique » est recommandée. Elle est dite anatomique car sa modulabilité lui permet d’être construite en peropératoire et de s’adapter à la morphologie de l’humérus et donc aux réglages très subtils de la géométrie de l’épaule (fig. 2). Ces prothèses de 3e génération ont permis un très net progrès sur les mobilités postopératoires dont le gain peut pratiquement être assuré à tout coup au patient, y compris pour les rotations (coiffure, soutien-gorge, hygiène). En cas de phase terminale des ruptures de coiffe, l’arthrose est dite excentrée, c’est-à-dire qu’une articulation anormale s’est constituée entre l’acromion et la tête humérale. La chirurgie fera appel à une prothèse non anatomique de type « inversée » – congruence articulaire inversée, partie concave rétentive humérale et non plus glénoïdale – et permet ainsi de réabaisser le centre de rotation de l’articulation tout en s’opposant aux forces ascensionnelles (fig. 3). En l’absence de coiffe des rotateurs, ces prothèses ne fonctionnent que sous la seule action du deltoïde, ce qui explique leur résultat spectaculaire sur l’élévation du bras et un peu moins sur les rotations. Dans les deux cas, l’hospitalisation est d’une semaine et nombre de patients retournent directement à leur domicile aidés par un kinésithérapeute libéral.
Des résultats prometteurs
Les prothèses d’épaule ont beaucoup évolué et les modèles les plus récents permettent de restituer fidèlement l’anatomie du patient ou de s’y adapter. Dans l’arthrose centrée, ce respect fidèle de l’anatomie est lié au fait que l’assemblage de la prothèse a lieu pendant la chirurgie. L’utilisation de ce type de prothèse permet donc de s’adapter exactement à la morphologie du patient et d’obtenir des résultats très satisfaisants sur les mobilités et souvent spectaculaires sur les douleurs. On conseille de mettre en place ces prothèses dès l’âge de 50 ans. Leur durée de vie est en moyenne de dix à douze ans. Les descellements secondaires sont relativement bien tolérés et ne nécessitent souvent pas de réintervention. Dans l’arthrose excentrée, la rupture peut être compensée grâce à l’utilisation d’un centre de géométrie abaissé et médialisé. Les résultats obtenus sont également bons, mais la longévité de ces prothèses est moins bien connue, ce qui conduit nombre de chirurgiens à ne les utiliser régulièrement qu’après l’âge de 70 ans. La mise au point des dernières prothèses d’épaule a donc permis de donner beaucoup d’espoir à des patients ayant des douleurs souvent intolérables et rebelles à tout traitement antalgique. L’effet sur les mobilités est lui aussi de plus en plus spectaculaire. Voilà pourquoi la pose d’une prothèse doit être discutée et envisagée suffisamment tôt dans la prise en charge des patients souffrant d’omarthrose.
D’après un entretien avec le Pr Hervé Thomazeau, Chru Rennes.
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