Au début des années quatre-vingt-dix, les seules connaissances génétiques en matière de diabète et d'obésité se limitaient à la mise en évidence, sans réelles explications physiopathologiques, d'une susceptibilité au diabète de type 1 liée à des groupes HLA particuliers. Actuellement, les recherches menées sur le diabète ont permis de prouver l'existence d'une composante monogénique, inconnue jusqu'alors, dans les maladies les plus répandues, telles que le diabète de type 2 et l'obésité. Ces recherches ont permis la mise en évidence de certains gènes, dont la caractérisation a rendu possible une nouvelle forme d'approche thérapeutique des formes monogéniques. « Mais l'avancée la plus marquante liée à ce travail génétique tient à une meilleure compréhension de la physiologique du pancréas, en ce qui concerne le diabète, et du cerveau, en matière d'obésité », précise le Dr Philippe Froguel.
Les formes monogéniques
A l'heure actuelle, la grande majorité des gènes liés aux formes monogéniques de diabète et d'obésité sont connus. Ainsi, sept ou huit gènes liés au diabète de type 2 monogénique ont été mis en évidence depuis 1992. Il s'agit généralement de gènes entraînant des formes de diabète de type 2 apparaissant dans l'enfance ou à l'adolescence (MODY), et d'autres gènes, plus rares, peuvent être à l'origine de formes monogéniques de la maladie apparaissant de façon plus tardive. Les recherches génétiques sur l'obésité sont plus récentes : elles ont débuté chez l'homme en 1997 par la mise en évidence du premier gène lié à une forme monogénique. « Aujourd'hui, seul le dépistage des formes monogéniques (5 % des diabètes et des obésités) est possible, mais le problème de la prise en charge de ce type de dépistage reste posé. En outre, la question des mesures préventives (médicaments ou hygiène de vie) à appliquer dans les suites du dépistage de ces maladies dont la pénétrance n'est que de 70 à 80 % (influence d'autres gènes et de facteurs d'environnement) », précise le Dr Froguel.
Au début de ces travaux génétiques, aucune carte du génome ni du marqueur n'était disponible, et les techniques de PCR n'étaient pas encore généralisées. C'est donc à partir des années 1993-1994, date à laquelle les premières cartes du généthon ont été réalisées, qu'un travail génétique rigoureux a pu réellement commencer. Dans un premier temps, les formes monogéniques ont été les plus étudiées, et ce n'est que depuis deux ou trois ans qu'un travail sur les formes communes de diabète et d'obésité a été entrepris. Il s'agit d'explorations systématiques du génome sur des populations génétiques importantes, ce qui a permis de mettre en évidence pour chacune des deux maladies, diabète et obésité, des régions de susceptibilité. Au total, actuellement, douze régions sont étudiées : certaines liées à un dysfonctionnement du pancréas, d'autres, communes au diabète et à l'obésité (gènes d'insulinorésistance du syndrome métabolique associé à une majoration du risque cardio-vasculaire et du risque de dyslipidémies), enfin, certaines régions sont associées à une obésité liée à un dysfonctionnement cérébral de la prise alimentaire.
Mais pour utiliser la génétique afin de prévenir les facteurs de risque, il faut encore, après avoir mis en évidence les gènes et les variants, travailler sur la génomique épidémiologique. « Si, en France, les structures coordinatrices qui permettraient de passer de la recherche fondamentale à la recherche appliquée manquent, en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, des recherches sur de larges populations sont envisagées. Associées au travail des différents consortiums de recherche sur les différents chromosomes et à la mise au point de puces à ADN contenant l'ensemble des gènes afin d'établir un profil de risque, la génomique épidémiologique devrait permettre le développement rapide de tests diagnostics et ouvrir la voie à des méthodes de prise en charge individualisées », conclut le Dr Froguel.
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