De notre correspondante
à New York
« Un aspect de l'étude de Perkins et coll. doit être souligné : la chance de régression est plus élevée avec une microalbuminurie de courte durée qu'avec une microalbuminurie ancienne », commente dans un éditorial associé Eberhard Ritz, de l'université d'Heidelberg (Allemagne). « Il va sans dire que ces études historiques sensibiliseront les médecins sur l'importance du dépistage de la microalbuminurie afin de permettre une intervention agressive précoce, en particulier une intervention qui entraîne un contrôle étroit de la glycémie. »
Le risque d'insuffisance rénale
La néphropathie complique le diabète de type 1 dans 30 % des cas et le diabète de type 2 dans environ 20 % des cas. Elle annonce un risque élevé de progresser vers une insuffisance rénale terminale, et est un indicateur d'une dysfonction vasculaire plus générale.
La microalbuminurie, ainsi dénommée car elle n'est pas décelée par les bandelettes standards, est la première manifestation de l'atteinte de la barrière de filtration glomérulaire.
Trois études majeures dans les années 1980 ont suggéré que la microalbuminurie chez les patients atteints de diabète type 1 est la première phase d'un processus inexorable aboutissant à la protéinurie et à l'insuffisance rénale. En effet, dans ces études, toutefois petites, la microalbuminurie conférait un risque élevé (de 60 à 85 %) de développer une protéinurie patente dans les six à quatorze ans.
Des études ultérieures ont remis en question ce modèle, suggérant un risque considérablement plus faible de progression vers la protéinurie.
Une nouvelle étude (Perkins, Krolewski [Joslin Diabetes Center, Boston] et coll.), publiée aujourd'hui dans le « New England Journal of Medicine », confirme que la microalbuminurie peut régresser et met en lumière les facteurs qui favorisent sa régression.
L'étude porte sur 386 patients ayant un diabète de type 1 et une microalbuminurie persistante pendant au moins deux ans (comprise entre 30 et 299 μg/minute, à plusieurs reprises pendant une période d'évaluation initiale de deux ans).
Ces patients ont été suivis pendant six ans, avec trois dosages d'albuminurie pour chaque période de deux ans. Pendant ce suivi de six ans, seulement une minorité des patients (19 %) ont progressé vers une protéinurie patente, tandis que la majorité (60 %) a présenté une régression significative de la microalbuminurie (réduction de 50 % de l'excrétion urinaire d'albumine entre des périodes successives de deux ans).
Facteurs de régression
Plusieurs facteurs sont indépendamment associés à la régression de la microalbuminurie :
- le caractère récent de la microalbuminurie ;
- des taux d'hémoglobine glycosylée inférieurs à 8 % ;
- de faibles taux sériques de cholestérol et de triglycérides (respectivement < 198 mg/dl et < 145 mg/dl) ;
- une faible TA systolique (< 115 mmHg).
Les patients qui ont des valeurs favorables pour les trois facteurs modifiables (Hb glycosylée, TA systolique, lipides) ont trois fois plus de chances de présenter une régression de la microalbuminurie, comparé aux patients qui n'en ont aucun.
Il est à noter que l'usage des inhibiteurs de l'enzyme de conversion, dont l'efficacité est démontrée pour prévenir la progression vers la protéinurie, ne sont pas associés à la régression de la microalbuminurie. Il est possible, suggèrent les auteurs, que leurs effets pharmacologiques bénéfiques qui préviennent la progression de la microalbuminurie n'influencent pas les mécanismes biologiques qui sous-tendent la régression de la microalbuminurie.
Cette étude « suggère un modèle de néphropathie diabétique précoce dans lequel la microalbuminurie est un marqueur de lésion rénale dynamique, plutôt que fixée », notent Perkins et coll..
Malgré les traits communs de la néphropathie diabétique précoce dans le diabète de type 1 et le diabète de type 2, d'autres études devront déterminer si ces observations s'appliquent aussi au diabète type 2, ajoutent les investigateurs.
Cette étude « apporte une note optimiste », note le Dr Ritz dans l'éditorial associé, « puisqu'elle prouve indirectement, bien que de façon non contrôlée, que le traitement agressif porte bien ses fruits ».
« New England Journal of Medicine » du 5 juin 2003, pp. 2285 et 2349.
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