Entretien avec Mariannick Le Bot

Développer l’analyse sur les erreurs et pas seulement sur le médicament

Publié le 30/04/2013
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Le projet de nouveau livre blanc sera présenté au prochain Hopipharm. Il renouvelle la réflexion autour du rôle joué par la pharmacie hospitalière au sein du parcours de soins. Explication.

Décision Santé-le Pharmacien Hôpital. Quel est votre jugement sur l’action menée par Marisol Touraine un an après sa nomination ?

Mariannick Le Bot. La découverte des dossiers et la mise en place des groupes de travail sont peut-être un peu longues. Il faudra attendre 2014 pour faire voter des dispositions législatives. On nous a demandé de travailler très rapidement pour la mission pacte de confiance à l’hôpital afin de boucler les travaux avant la fin de l’année 2012. Cela était-il vraiment indispensable ? D’autant qu’à la suite des 13 propositions de Marisol Touraine, de nouveau groupes de travail sont en cours de reconstitution.

D. S-P. H. Depuis le vote de la loi Bertrand, le dossier sur l’information autour du médicament ne semble guère avancer…

Mariannick Le Bot. On le regrette. Le développement de la base de données publique a pris beaucoup de retard. Ce n’était qu’un des volets de ce que nous avions proposé lors des Assises du médicament. Nous avions préconisé un vrai service public d’information structuré autour d’un réseau local, régional, national. Cette question avait été au centre de notre dernier congrès. Elle est pour nous fondamentale si l’on veut bien structurer cette fonction dans notre pays, comme elle l’est en Grande-Bretagne ou en Belgique. Elle sera de nouveau abordée cette année à partir d’une proposition d’expérimentation.

D. S-P. H. Quel regard portez-vous sur la politique des achats ?

M. L.B. Nous sommes dans une logique territoriale. La modernisation de la fonction achat pour les produits de santé fera l’objet d’une session au cours de notre congrès. Les résultats obtenus par les Hospices civils de Lyon (HCL) et les groupements d’achats de la région Rhône Alpes feront l’objet d’une présentation, avec la participation de l’ARS. Notre position sur ce thème n’a pas évolué. Toute pharmacie hospitalière doit faire partie d’un groupement d’achat à partir d’un territoire de santé pour collaborer ensemble, installer des commissions du médicament, rédiger des livrets thérapeutiques et protocoles de bon usage, bref mettre en commun nos ressources.

D. S-P. H. Un autre dossier paraît en panne, celui de la pharmacovigilance…

M. L.B. La directive européenne vient d’être publiée avec un nouveau décret immédiatement applicable. Elle est loin d’être claire, même si l’idée est de faciliter le signalement des évènements indésirables. Nous recommandions plutôt de nous limiter à recenser les évènements liés à l’utilisation conforme aux RCP du médicament. Ce qui définissait auparavant la pharmacovigilance. L’évènement hors de l’utilisation réglementée relève de l’erreur médicamenteuse comme les surdosages par exemple. Or, le texte européen est loin de clarifier la situation. L’important est d’élaborer là aussi un cadre local et national. Le guichet global erreur que nous avions proposé est à l’arrêt, faute d’articulation entre l’analyse des pratiques et celle des erreurs liées aux process. Le programme national de sécurité patient a certes été mis en place autour d’un axe déclaration. Le travail en commun DGS, DGOS, HAS, devrait permettre de mener à bien ce travail autour des erreurs de pratiques, liées aux organisations et pas seulement liées au produit. L’ANSM a conservé son guichet erreur et créé un groupe d’experts mais avec une orientation toujours limitée au produit. Nous avons besoin d’un cadre plus large pour faire avancer la sécurité des patients. Les aspects de formation initiale et continue des professionnels de santé sur le bon usage des produits de santé en particulier sont à aborder de manière prioritaire.

D. S-P. H. Vous vous attelez à un nouveau livre blanc.

M. L.B. Les premiers projets seront présentés à Hopipharm avant une publication en fin d’année. Il s’intitulera Cap 2020 et sera axé autour de la prise en charge globale du patient. Le séjour hospitalier doit permettre une évaluation des prises en charges thérapeutiques et inscrire pleinement la pharmacie hospitalière dans le parcours de soin. Ce sera l’occasion pour le Synprefh de présenter son nouveau bureau : Patrick Léglise en assure à présent la présidence et Mireille Jouannet le secrétariat général.

* Vice-présidente du Synprefh (Syndicat national des pharmaciens des établissements publics de santé).
Propos recueillis par Gilles Noussenbaum

Source : Décision Santé: 291