La stimulation cardiaque adrénergique prolongée pourrait être l'une des causes du développement et de l'aggravation d'une insuffisance cardiaque.
La libération de noradrénaline est contrôlée par un feedback négatif à partir des récepteurs présynaptiques alpha 2-adrénergiques. La cible de cette sécrétion est constituée par les récepteurs bêta 1-adrénergiques des myocytes. On connaît au moins deux polymorphismes de ces récepteurs qui influent de façon notable sur leur fonction. La délétion alpha 2C 322-325 diminue l'impact du système adrénergique, alors que le variant Arg 389 du récepteur bêta 1 majore sa fonction.
L'équipe du Dr Kersten Small (Cincinnati) a cherché à savoir si ces deux variants des récepteurs adrénergiques influent sur la fonction des myocytes et prédisposent à l'aggravation des signes d'insuffisance cardiaque. Pour cela, elle a procédé à un génotypage de ces loci chez 159 sujets souffrant d'insuffisance cardiaque (78 Noirs et 81 Caucasiens) et 189 témoins (84 Noirs et 105 Caucasiens). « Comme cela avait déjà été rapporté dans différentes études, nous avons noté une différence de répartition de deux variants entre Noirs et Caucasiens. Ainsi, alpha 2C Del 322-325 était dix fois plus fréquent chez les sujets contrôles noirs que chez les caucasiens. Le variant bêta 1 Arg 389 était, pour sa part, légèrement surreprésenté chez les sujets caucasiens », expliquent les auteurs.
Majoré d'un facteur 10,11
« En raison de la faible prévalence de la délétion 322-325 du récepteur alpha 2C chez les sujets caucasiens, nous n'attendions pas de majoration du risque d'insuffisance cardiaque chez ces sujets. Néanmoins, dans la population étudiée, il existe un risque statistique majoré de maladies chez les porteurs de la délétion », poursuit le Dr Small. Chez les Noirs, la délétion 322-325 du récepteur alpha 2C s'accompagne d'une majoration d'un facteur 5,65 du risque d'insuffisance cardiaque, alors que le génotype bêta 1 Arg 389 pris individuellement n'est pas, pour sa part, associé à la maladie. Lorsque les deux variants existent chez la même personne - ce qui est le cas dans une proportion non négligeable de la population noire -, le risque d'insuffisance cardiaque est majoré d'un facteur 10,11. On ne connaît pas encore bien le type d'interaction entre ces deux variants, mais il semble que les deux effets se potentialisent du fait de leurs différents sites d'action.
« Cette découverte soulève des questions quant à l'utilisation clinique possible de ces résultats », analysent les auteurs. En effet, si l'on se base sur cette publication, il semble nécessaire d'instaurer chez tous les patients présentant les deux variants étudiés un traitement par antagonistes des récepteurs alpha 2-adrénergiques et par antagonistes des récepteurs bêta-adrénergiques. Dans ces conditions, on peut imaginer que le génotypage pourrait être utilisé pour la mise en place de traitements surmesure dans l'objectif de prévenir l'aggravation d'une insuffisance cardiaque.
La question d'un éventuel traitement des sujets asymptomatiques présentant les deux variants reste encore posée. Seules des études contrôlées pourraient permettre d'en évaluer l'intérêt en prévention de l'hypertrophie myocardique et de l'insuffisance cardiaque.
« The New England journal of Medicine », vol. 357, n° 15, pp. 1136-1142, 10 octobre 2002.
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