Nous sommes dans une voiture, à Téhéran, et nous n'en sortirons pas. Au volant, une bourgeoise divorcée qui ne dédaigne pas les lunettes de soleil ou le voile délicatement dénoué. A côté d'elle, selon la séquence (il y en a dix, on l'aura deviné), son fils, une amie abandonnée par son mari, une veuve, une prostituée. Ils parlent et ils disent la condition de la femme iranienne aujourd'hui, avec parfois des mots que l'on aurait cru prohibés dans le pays de Khomeyni. Kiarostami les filme de face, en gros plans, avec une caméra numérique.
La mise en scène, en apparence, se résume donc à peu de choses. En fait, explique le cinéaste, palme d'or à Cannes en 1997 pour « le Goût de la cerise » (partagée avec « l'Anguille » d'Imamura), « le metteur en scène dans ce cinéma ressemble plutôt à un entraîneur de football. Il doit faire l'essentiel de son travail avant le commencement de la prise de vue ».
La mise en scène ne se voit pas mais elle est là dans l'émotion que suscitent les acteurs non professionnels, résultat de tout un travail de préparation, de discussions.
L'absence de progression dramatique, de perspective, déroutent au premier abord, comme souvent les films de Kiarostami. Il faut rester patient, mériter la récompense d'une oeuvre pas comme les autres. Le cinéaste avait été frappé par une anecdote rapportée par l'écrivain Milan Kundera : à la fin de sa vie, son père n'utilisait plus que deux mots et répétait « C'est étrange ! c'est étrange ! ». « Ce film est mon"deux mots" à moi, dit le cinéaste de 71 ans. Qui résume presque tout. Et je dis presque, parce que je pense déjà à mon prochain film. Un film en un seul mot peut-être. »
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