Impliqués dans trois quarts des cas

Deux gènes en cause dans la Dmla

Publié le 05/03/2006
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DE NOTRE CORRESPONDANTE

«JE NE CONNAISpasd’autre exemple de maladie génétiquement complexe dans laquelle près de 75% de la causalité génétique ait été identifié, observe le Dr Allikmets (New York), qui a dirigé le travail. Ces résultats sont importants parce qu’ils confirment le rôle de deux gènes, et par conséquent le rôle central d’une voie de réponse immune spécifique, dans la dégénérescence maculaire liée à l’âge. Non seulement nous avonsconfirmé cette association statistiquement et génétiquement, mais, surtout, nous avons désigné l’origine de la maladieEn quelques années seulement, nous sommes passés d’une connaissance très minime des causes de la Dmla à une connaissance plutôt bonne. Nous disposons à présent de cibles bien distinctes pour une intervention thérapeutique précoce.»

Si cette découverte explique une grande partie du risque génétique, les facteurs déclenchants spécifiques qui activent la réponse immune, et l’inflammation qui en résulte restent encore inconnus. Les chercheurs de l’équipe se penchent sur cette question, à la recherche des coupables bactériens et viraux.

La Dmla atteint la macula et mène à une perte progressive et définitive de la vision centrale. Le sujet constate tout d’abord une baisse de sa vision, puis l’apparition d’une tache sombre centrale et une déformation des lignes droites. Au stade avancé, il ne peut plus lire, écrire, conduire une voiture ou reconnaître les visages. En France, on estime que deux millions de personnes sont atteintes.

Des facteurs de risque.

A ce jour, il n’existe aucun traitement curatif. Nombre de facteurs de risques ont été identifiés : l’âge, le tabagisme (multiplie le risque par 2 ou 3), l’exposition prolongée aux rayons ultraviolets, les yeux clairs, le sexe féminin, l’hypertension et l’hypermétropie. De plus, des facteurs génétiques (prédispositions familiales) contribuent de façon importante à l’apparition de la maladie.

L’année dernière, trois équipes indépendantes de chercheurs avaient identifié simultanément le premier gène majeur de prédisposition. Plusieurs variations du gène CFH (facteur H du complément) majoraient le risque d’un facteur 2 à 7.

Le facteur H du complément est un inhibiteur majeur de la voie alternative du complément. Il contribue à inhiber la réponse immune contre une infection bactérienne ou virale dès que l’infection est éradiquée. Les patients porteurs de ces variants à risque du facteur H sont moins capables de contrôler l’inflammation déclenchée par les infections, ce qui pourrait à la longue favoriser la survenue de la Dmla. Toutefois, la mutation de ce gène n’est pas suffisante pour prédire la survenue de la Dmla, puisque environ un tiers des personnes portant ce variant à risque ne la déclarent pas.

L’une des trois équipes, qui avait rapporté cette découverte, publie la suite de ses recherches dans la revue « Nature Genetics ». L’équipe, dirigée par le Dr Rando Allikmets (New York), inclut le groupe du Dr Gregory Hageman (Iowa University) et celui du Dr Michael Dean (National Cancer Institute, Frederick, Md).

Un haplotype à risque et deux protecteurs.

Les investigateurs ont décidé de rechercher d’autres variants à risque, en se concentrant sur la même voie de réponse immune qui contient le facteur H, et notamment le facteur B.

L’analyse génétique, portant sur deux cohortes indépendantes composées globalement de 900 patients et de 400 témoins appariés, a rapidement identifié le facteur B comme étant un modificateur majeur de la maladie. L’analyse a permis d’identifier un haplotype à risque et deux haplotypes protecteurs.

Cette découverte s’explique bien biologiquement : tandis que le facteur H est un inhibiteur de la réponse immune à l’infection, le facteur B est un activateur. Ainsi, devant les rôles complémentaires de ces deux gènes, un variant protecteur du facteur B peut protéger un individu contre la Dmla, même s’il porte un variant du facteur H à risque, et vice versa.

Les deux gènes du facteur H et facteur B expliquent près de trois quarts des cas de Dmla : 74 % des patients atteints n’ont aucun variant protecteur de ces gènes, mais portent un variant à risque pour le facteur H et/ou le facteur B.

« Nature Genetics », 5 mars 2006, Gold et coll., DOI : 10.1038/ng1750.

> Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7912