« LE RISQUE de maladie cardio-vasculaire est dix fois plus élevé chez les diabétiques de type 1 que dans la population non diabétique », rappelle, dans un communiqué, le Dr David Nathan (Massachusetts General Hospital, Boston) qui a codirigé l'étude EDIC avec le Dr Saul Genuth (Case Western University). « Il est difficile de maintenir un contrôle strict de la glycémie, mais ses avantages sont immenses. Son contrôle intensif réduit significativement le risque de maladie cardio-vasculaire, ainsi que les complications oculaires, rénales, et nerveuses chez les diabétiques de type 1. Plus le suivi des patients s'allonge, plus nous sommes impressionnés par les bénéfices durables du contrôle strict », ajoute-t-il.
Annoncés en 1993, les résultats de l'étude DCCT (Diabètes Control and Complications Trial) montraient clairement le bénéfice du traitement intensif sur l'apparition et la progression des complications microvasculaires du diabète de type 1 (rétinopathie, néphropathie, neuropathie).
L'étude DCCT avait réparti, par tirage au sort, 1 441 diabétiques insulinodépendants en deux groupes de traitement : intensif ou classique. Ils étaient âgés de 13 à 39 ans et avaient été traités, en moyenne, pendant 6,5 ans entre 1983 et 1993.
Trois injections d'insuline au moins.
Le traitement intensif consistait en un minimum de 3 injections quotidiennes d'insuline ou en une pompe à insuline, avec ajustement des doses en fonction de quatre autocontrôles par jour, au moins. L'objectif était de maintenir la glycémie à jeun entre 0,7 et 1,2 g/l, et en postprandial à moins de 1,8 g/l, ainsi qu'une HbA1c à moins de 6 %.
Le traitement classique reposait sur une ou deux injections d'insuline et un contrôle quotidien, avec pour objectif de prévenir les symptômes d'hyper- ou d'hypoglycémie.
Au terme de l'étude, le groupe au traitement intensif avait, en moyenne une HbA1c à 7 %, contre à 9 % pour le groupe au traitement classique.
A l'arrêt de l'étude DCCT, il a été conseillé à tous les participants de poursuivre ou d'adopter le traitement intensif. La réponse a été favorable puisque 94 % du groupe traité classiquement ont opté pour le traitement intensif.
Les résultats publiés dans le « New England Journal of Medicine » portent sur 1 341 participants (93 % de la cohorte d'origine) qui ont accepté le suivi jusqu'en février 2005, dans l'étude EDIC (Epidemiology of Diabetes Interventions and Complications).
Cette étude de suivi avait établi, il y a cinq ans, le bénéfice durable des six premières années de traitement intensif sur le risque ultérieur de complications microvasculaires. Mais un autre objectif majeur était de savoir si le contrôle glycémique à long terme pouvait réduire le risque de maladie cardio-vasculaire, première cause de décès chez les diabétiques de type 1. Cette question est d'importance car l'athérosclérose débute dès l'adolescence, et est plus fréquente chez les enfants diabétiques.
Infarctus, angor, AVC...
Pour posséder un pouvoir statistique correct, l'étude devait attendre que 50 patients du groupe de départ, traités classiquement, présentent un événement cardio-vasculaire (infarctus, angor, AVC, chirurgie coronarienne). Ce chiffre a été atteint en 2005.
Il est important de noter que durant les onze ans de suivi de l'étude EDIC, les différences de contrôle glycémique se sont effacées entre les deux groupes (HbA1c de 8 % en moyenne). Dès lors, la différence entre les deux groupes reflète le bénéfice à long terme des six premières années de traitement intensif.
Sur les dix-sept ans de suivi, les auteurs ont relevé 46 événements cardio-vasculaires chez 31 patients du groupe traité intensivement dès l'origine (4 %) et 98 événements chez 52 patients dans l'autre groupe (7 %).
Le traitement intensif a réduit de 42 % le risque d'un événement cardio-vasculaire, et de 57 % celui d'un accident sérieux (infarctus, AVC, décès de cause cardio-vasculaire). Ce dernier résultat est remarquable. Comme le soulignent les auteurs, cette baisse est supérieure aux réductions de risque obtenues avec les antihypertenseurs et les hypolipémiants.
En outre, le meilleur contrôle glycémique, attesté par la baisse de l'HbA1c durant l'étude DCCT, est responsable en majeure partie du bénéfice du traitement intensif sur le risque cardio-vasculaire.
« Ce bénéfice renforce le message original de l'étude DCCT, qui était : débuter le traitement intensif le plus tôt possible chez le diabétique de type 1 », concluent les chercheurs.
Dans un éditorial, le Dr William Celafu (Louisiana State University, Baton Rouge) se demande si les objectifs glycémiques actuels, fondés sur la prévention des complications microvasculaires, doivent être revus vers la rigueur. En effet, les valeurs d'HbA1c actuellement recommandées chez le diabétique de type 1 sont : de 7 % chez l'adulte, de 7,5 % entre treize et dix-neuf ans, et de 8 % entre six et douze ans. Toutefois, une raison de ne pas modifier ces objectifs, est la difficulté à les atteindre pour les enfants et les adolescents. Il souligne donc le besoin d'approches innovantes et de nouvelles thérapies pour améliorer et maintenir le contrôle glycémique chez le diabétique de type 1.
« New England Journal of Medicine », 22 décembre 2005, pp. 2643 et 2707.
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