DEUX MOLECULES issues du surnageant de culture des champignons Beauveria, le beauveriolide I et le beauveriolide III pourraient un jour être utilisées pour traiter l'athérosclérose. Une équipe japonaise de l'université Kitasato (Tokyo) vient en effet de découvrir l'effet antiathérosclérotique de ces composés.
In vivo chez la souris, les auteurs ont montré que le beauveriolide III permet de réduire les lésions athérosclérotiques du cœur et de l'aorte de 52 % et 54 % respectivement. La molécule administrée oralement quotidiennement pendant plusieurs mois et même à une dose très importante (quatre fois la dose nécessaire à l'effet thérapeutique) ne semble engendrer aucun effet secondaire délétère (pas de diarrhée, pas de toxicité au niveau de la glande surrénale).
Des macrophages aux cellules spumeuses.
En outre, Namatame et coll. ont réussi à identifier le mécanisme moléculaire par lequel les beauveriolides exercent leur activité.
L'équipe japonaise avait récemment mis au point un système permettant d'étudier les mécanismes qui conduisent à la transformation des macrophages en cellules spumeuses au cours du stade précoce de l'athérosclérogenèse. Ce système a été utilisé pour identifier des composants capables d'inhiber ce processus. Les chercheurs japonais ont ainsi découvert un effet de la beauveriolide I et de la beauveriolide III : ces deux membres de la famille des cyclodepsipeptides ont la propriété d'inhiber l'accumulation des gouttelettes lipidiques dans le cytoplasme des macrophages.
Cependant, cette première série d'expériences ne permettait pas de connaître la nature de la cible moléculaire par laquelle les beauveriolides exerçaient leur effet sur les macrophages.
D'autres molécules capables d'empêcher l'accumulation des lipides dans les macrophages, en particulier certains autres membre de la famille des cyclodepsipeptides, sont connues pour inhiber la synthèse du cholesteryl ester (CE) et celle du triacylglycérol (TG). L'utilisation de précurseurs radioactifs a permis à Namatame et coll. de constater que les beauveriolides I et III inhibent de manière spécifique la synthèse du CE mais n'ont pas d'effet sur celle du TG.
Les beauveriolides agissent donc au niveau d'une cible moléculaire localisée en amont de la synthèse du CE, une étape se déroulant dans le réticulum endoplasmique. Par ailleurs, les auteurs ont pu démontrer que les beauveriolides agissaient sur une étape du métabolisme du cholestérol se situant en aval des lysosomes. L'hypothèse selon laquelle la cible moléculaire des deux nouveaux inhibiteurs devait être une enzyme du réticulum endoplasmique, l'acyl-CoA:cholestérol acyltransférase (ACAT) a alors été proposée.
Les microsomes.
L'utilisation de microsomes préparés à partir de macrophages murins, qui expriment ACAT-1, ou de cellules hépatiques murines et de cellules intestinales humaines, qui expriment ACAT-2, a permis la vérification de cette hypothèse.
Ainsi, les beauveriolides I et III inhibent l'activité de ACAT-1 et ACAT-2. Cet effet conduit à un défaut de synthèse de CE dans les macrophages. En conséquence, ces deux cyclodepsipeptides empêchent l'accumulation des gouttelettes lipidiques dans les macrophages, sans pour autant modifier la synthèse du TG.
L'effet antiathérogénique du beauveriolide III ayant en outre été montré in vivo chez la souris, cette molécule semble posséder tous les atouts pour permettre au développement d'une nouvelle stratégie de thérapie de l'athérosclérose ; à quand les premier essais chez l'homme ?
I. Namatame et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée, à paraître prochainement sur www.pnas.org
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