Pour la médecine libérale, c’est une révolution. Les « contrats santé solidarité » que l’Assemblée nationale a adopté la semaine dernière signent en effet la fin d’une époque. Et d’abord, parce qu’ils sanctionnent l’échec d’une dynamique contractuelle. A défaut d’être parvenu à s’entendre depuis plus d’un an, caisses et syndicats sont punis. Ils viennent de se faire déposséder d’un dossier prioritaire pour la médecine de ville. Certes, la démographie médicale est un sujet si sensible que les partenaires conventionnels ne sont pas fâchés d’en être débarrassés. Mais quelque part, ils ont tort. C’est le début de la fin pour une convention nationale, qui risque d’être encore davantage mise à mal demain par des négociations directes au niveau régional.
Le deuxième tournant est conceptuel. La politique de la carotte, c’est fini. Vive celle du bâton ! Pour la première fois depuis l’adoption des principes de la médecine libérale en 1926, voilà en effet que l’on veut amener des médecins à exercer une partie de leur activité dans un endroit qu’ils n’ont pas choisi. Certes, ce service médical obligatoire reste un système infiniment moins contraignant que le numerus clausus à l’installation, appliqué aux infirmières. Mais c’est un précédent qui, à l’évidence, augure d’autres entailles dans la sacro-sainte liberté d’installation. Au passage, c’est aussi la preuve que les futurs schémas régionaux ambulatoires seront bel et bien opposables. Mais qui croyait encore aux dénégations de la ministre ?
Les sceptiques objecteront que ces nouveaux « contrats » - et la taxe qui sanctionnera ceux qui n’en voudront pas- ne sont pas pour tout de suite. Et c’est vrai : avant que les premières vacations ne soient mises en place, beaucoup d’eau passera donc encore sous les ponts en zones désertifiées… Les médecins, qui en ont vu d’autres, pourraient être tentés de prendre la menace à la légère : après tout, la FMC est réputée obligatoire depuis 1996, la taxation des feuilles de soins « papier » est en vigueur depuis le plan Juppé, et, avec la réforme Douste, le médecin traitant est censé mettre à jour le DMP ( !) de son patient… Pourtant, si la politique de santé donne parfois l’impression d’être un cimetière de réformes inabouties, cette fois, c’est différent. Les débats à l’Assemblée ont montré à quel point la pénurie inquiétait élus et opinion. Et sur le sujet, les pouvoirs publics ne peuvent plus temporiser.
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