Le rapport du groupe de travail sénatorial consacré à la présence médicale sur l’ensemble du territoire a déclenché les foudres des syndicats de médecins libéraux, des étudiants et des internes.
Dans ce document poil à gratter, les sénateurs Jean-Luc Fichet (PS) et Hervé Maurey (UDI), préconisent un encadrement strict de la liberté d’installation, plaident pour un conventionnement sélectif selon la densité et souhaitent obliger les jeunes spécialistes à aller exercer deux ans dans un hôpital désigné par l’ARS.
Si la situation ne s’améliorait pas d’ici à 2017, il faudrait selon eux contraindre les jeunes généralistes à aller exercer en zone sous-médicalisée.
Front intergénérationnel
La profession, toutes générations confondues, n’a pas tardé à faire front commun contre ces propositions coercitives. « Lier le conventionnement à la démographie entraînerait une fuite plus grande des jeunes diplômés vers le salariat et assécherait le renouvellement de la médecine libérale », affirme l’UNOF, la branche généraliste de la CSMF. La Confédération se dit « consternée » par les propositions sénatoriales : « Le conventionnement sélectif et la création d’un service public obligatoire pour les jeunes médecins sont des mesures totalement ineptes, dangereuses et contreproductives ».
Le syndicat cite une étude de l’IRDES selon laquelle 95 % des Français ont accès à des soins de proximité en moins de 15 minutes. Dans un communiqué de 3 pages, la CSMF appelle le gouvernement à poursuivre sa politique d’incitation déclinée dans le pacte territoire santé. Selon le syndicat, il faut notamment répondre aux aspirations des jeunes, améliorer les rémunérations et la couverture sociale des médecins libéraux et faire rentrer l’exercice libéral dans le cursus de formation initiale.
Inacceptable, inadapté, inefficace
MG France considère que les propositions de régulation de l’installation sont « inacceptables » et ne constituent pas des « réponses adaptées à la mesure des problèmes que soulève la désertification médicale ». « La vraie réponse aux déserts médicaux est inscrite dans certaines propositions du Sénat : favoriser le travail en équipe et la coopération des professionnels de santé, encourager de nouvelles formes d’exercice... »
Dans un communiqué commun, les étudiants (ANEMF), internes (ISNIH et ISNAR-IMG) et les jeunes généralistes et remplaçants (REAGJIR) ont dénoncé un rapport « baclé » et « rédigé à charge ». « Les propositions concernant les études médicales montrent la méconnaissance totale du cursus », taclent-ils. Le stage de médecine générale pendant le 2e cycle est déjà obligatoire depuis 1997 et les ECN sont déjà en adéquation avec les besoins régionaux pour chaque filière, ironisent-ils.
L’obligation pour les médecins spécialistes d’exercer deux ans à l’hôpital retarderait d’autant l’installation et n’encouragera pas l’installation en libéral, affirment les associations de jeunes. « La régulation à l’installation mise en place dans plusieurs pays européens a montré son inefficacité et elle accroît le risque du déconventionnement », déclarait Emanuel Loeb, président de l’ISNIH, à l’issue de la présentation du rapport au Sénat. « Les sénateurs ont cédé à la coercition alors qu’ils la savent inefficace », déplore Emmanuel Bagourd, président de l’ISNAR-IMG.
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