Le sénateur centriste de la Haute-Loire et président du conseil général Gérard Roche s’est montré extrêmement critique à l’égard des jeunes médecins dans le quotidien « L’éveil de la Haute-Loire » en octobre. À 71 ans, cet ancien médecin généraliste (jusqu’en 1989) s’est prêté à un entretien sans fard, où il aborde notamment la question de la désertification médicale.
Dans cette vidéo, il prend d’abord position en faveur d’une contrainte de l’installation et du conventionnement des médecins libéraux. « Quand un professeur passe son CAPES ou son agrégation en Haute-Loire, la première chose qu’il fait, c’est de partir à Créteil (en banlieue parisienne). On ne choisit pas sa nomination dans le service public. Il faut que les médecins aillent là où on en a besoin et qu’on les conventionne là où il y a besoin », assène-t-il. L’élu s’en prend ensuite vertement aux horaires de travail : « On ne peut pas faire médecine générale en ne travaillant pas le mercredi parce qu’il faut garder les gamins et en arrêtant le vendredi jusqu’au lundi matin. On ne peut pas avoir une rémunération de profession libérale et vouloir vivre comme un fonctionnaire. »
Les altruistes (avant) et les égoïstes
Gérard Roche ne s’arrête pas en si bon chemin. Ses propos repris dans l’édition papier du 18 octobre sont encore plus sévères : « À une génération pétrie d’altruisme, de don de soi, de désintéressement et d’amour universel, délaissant leur rôle d’époux, négligeant leurs enfants, sacrifiant leur santé à l’humanité tout entière, bref à des saints, succède une tout autre "race" de médecins. Les générations présentes n’ont plus la sacro-sainte vocation, délaissent l’humanisme au profit d’une vie tranquille et néanmoins lucrative, et tutoient même la malhonnêteté en se faisant rémunérer abusivement leurs nuits d’astreinte en réalité ensommeillées. »
Tollé
Cette charge jugée peu confraternelle a provoqué de vives réactions parmi les médecins du département. Ils se sont réunis à l’initiative du syndicat MG France au Puy-en-Velay, rapporte la presse locale. Le président du syndicat départemental, le Dr Roland Rabeyrin, est revenu sur l’image de sa profession véhiculée par le sénateur Roche. « Il n’a pas compris que le métier de généraliste a complètement évolué : aujourd’hui, il ne se contente pas de répondre à des demandes de soins aiguës. Il doit gérer les maladies chroniques, assurer la prévention des maladies cardio-vasculaires et des cancers, mais également faire de l’éducation thérapeutique ». Il a ensuite rappelé les revenus professionnels : un médecin gagne en moyenne 6 274 euros en Auvergne, et non 7 000 et 10 000 euros, comme le prétend Gérard Roche.
Le Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) dénonce de son côté la « violence édifiante » de propos jugés insultants, marqués par une « franche méconnaissance des conditions actuelles d’exercice, tant en matière de pénibilité que de rémunération ». Le syndicat épingle la conception « sexiste et rétrograde » du sénateur quant aux rôles des femmes et des hommes dans la vie familiale.
Le SNJMG demande à rencontrer Gérard Roche afin de lui faire part de « la réalité de l’exercice de la médecine en 2013 » et ne pas décourager les installations dans ce département.
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