UN TROUPEAU DE VEAUX très précieux vient de naître en Autriche. Ces animaux sécrètent dans leur sérum un anticorps recombinant bispécifique qui pourrait se révéler très efficace dans le traitement des mélanomes.
Des anticorps bispécifiques.
Diverses études ont récemment démontré l'intérêt et l'efficacité thérapeutique des anticorps recombinants. Les propriétés antitumorales des anticorps bispécifiques sont particulièrement prometteuses : ces protéines sont en effet capables de diriger l'activité des cellules effectrices du système immunitaire vers des cellules tumorales. Malheureusement, ce type de protéines recombinantes est très difficile à produire dans des quantités compatibles avec leur utilisation en clinique.
Plusieurs systèmes cellulaires d'expression des protéines recombinantes humaines ont été développés depuis le début des années 1980. Mais aucun d'entre eux n'est vraiment adapté à la production en masse de protéines aussi complexes que les anticorps bispécifiques : dans les systèmes d'expression bactériens, les protéines synthétisées ont tendance à se replier de manière incorrecte. Dans les systèmes se fondant sur l'utilisation de cellules d'insectes, de levures ou de plantes, la conformation des protéines produites est normale, mais leur profil de glycosylation diffère de celui attendu. Au final, les seuls systèmes cellulaires qui permettent d'obtenir des protéines recombinantes humaines de bonne qualité sont les cellules de mammifères en culture. Mais leur utilisation n'est pas compatible avec une production massive de protéines destinées à un usage thérapeutique : la culture in vitro des cellules de mammifères est fastidieuse et très coûteuse. En outre, le rendement de ces systèmes d'expression reste assez médiocre.
Puisque aucun système cellulaire n'était vraiment satisfaisant, les chercheurs ont eu l'idée de tirer profit du récent développement des techniques de transgénie chez les mammifères : c'est ainsi que les premiers animaux transgéniques exprimant des protéines recombinantes humaines d'intérêt thérapeutique dans leur lait ou dans leur sang ont vu le jour.
Grosse-Hovest et coll. ont utilisé cette stratégie pour produire un anticorps bispécifique qui reconnaît la protéine CD28 présente à la surface des lymphocytes T humains et un marqueur tumoral associé aux mélanomes.
Après avoir testé la faisabilité de leur stratégie chez le lapin, les chercheurs se sont lancés dans la construction de veaux transgéniques. Ils ont introduit un fragment d'ADN codant pour l'anticorps bispécifique dans des cellules fœtales de veaux. Les noyaux de ces cellules ont été transférés dans des ovules qui ont eux-mêmes été placés dans l'utérus de mères porteuses.
Stimulation de l'activité cytotoxique des CD28.
Neuf veaux transgéniques sont nés vivants et en bonne santé. Chacun d'entre eux exprime la protéine recombinante dans son sérum. Le protocole de purification décrit par Grosse-Hovest et coll. permet d'obtenir entre 0,05 et 0,1 g de protéine active par litre de sérum recueilli.
In vitro, les anticorps bispécifiques purifiés stimulent l'activité cytotoxique des lymphocytes T CD28 vis-à-vis des cellules de mélanome.
L'activité thérapeutique de ces protéines devrait bientôt être testé in vivo au cours d'essais cliniques.
L. Grosse-Hovest et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée, à paraître prochainement sur www.pnas.org
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