De notre correspondante
à New York
Selon le Dr David Prezant, médecin-chef du New York City Fire Department et principal investigateur de l'étude publiée cette semaine dans le « New England Journal of Medicine », les résultats confirment clairement que bon nombre des 11 000 pompiers qui ont porté secours au WTC ont été exposés à un nuage massif de poussières toxiques. La zone, sinistrée pendant des semaines, a continué de brûler, dégageant un air toxique et nauséabond.
Dans cette atmosphère, les pompiers, les policiers, les auxiliaires médicaux et les volontaires ont dû uvrer, le plus souvent sans masque protecteur. Quels ont été les effets sur leur santé ? On a parlé de toux et de dyspnée persistantes.
Une étude, conduite auprès des pompiers de New York, confirme et précise l'atteinte respiratoire qui a pu résulter d'une exposition précoce et intense sur les lieux de l'attentat.
Quatre niveaux d'exposition
Sur les 11 336 pompiers de New York, 343 (3 %) sont morts. Prezant (Montefiore Medical Center, Bronx) et coll. ont classé les survivants selon quatre niveaux d'exposition :
- élevé si le pompier était présent pendant la chute des tours ;
- modéré s'il est arrivé au cours des deux premiers jours ;
- faible s'il n'est arrivé qu'entre le troisième et le septième jour ;
- nul s'il n'est arrivé que deux semaines après.
Ils ont examiné combien de pompiers ont souffert de la « toux du World Trade Center », un syndrome qu'ils ont défini comme « une toux persistante accompagnée de symptômes respiratoires suffisamment sévères pour nécessiter un congé de maladie pendant au moins 4 semaines ».
Tous les pompiers atteints de la toux du WTC et un échantillon de ceux non touchés ont été soumis à un questionnaire standard, une spirométrie, un test de réactivité bronchique (test à la métacholine en octobre) et une radio des poumons. Dans le cadre d'un programme de protection respiratoire, la fonction pulmonaire de tous les pompiers avait été testée avant le 11 septembre.
La toux persistante du WTC
Bilan, 332 des pompiers survivants (3 %) ont présenté la toux persistante du WTC et sept mois d'observation. En plus de cette toux, ils avaient une dyspnée (95 %), un reflux gastro-sophagien (85 %) et une congestion nasale (54 %). Les effets respiratoires ont été proportionnels à l'intensité d'exposition.
Pour ceux présents au moment de la chute des tours (n = 1 636), c'est-à-dire fortement exposés, 8 % (n = 128) ont eu la toux du WTC, avec réduction de la capacité vitale et du volume expiratoire maximum-seconde (VEMS) et 23 % une hyper-réactivité bronchique.
Pour ceux arrivés dans les deux jours (n = 6 958), 3 % (n = 187) ont présenté la toux persistante et 8 % une hyperréactivité bronchique. Parmi ceux faiblement exposés (n = 1 320), la toux est survenue dans 1 % des cas (n = 17), aucune hyperréactivité bronchique n'a été relevée. Aucun des pompiers absents dans les deux premières semaines (n = 202) n'a été atteint.
« L'incapacité persistante liée aux expositions respiratoires pendant et après le 11 septembre fournit des leçons importantes pour notre défense civile », déclare dans un éditorial le Dr Paul Scanlon (Mayo Clinic, Rochester, New York). « Des désastres d'une échelle similaire sont possibles dans le futur... il faut se préparer pour des menaces mal définies, comme celles des agents biologiques, des rayonnements et des armes chimiques... Il est important que la profession médicale, conjointement aux services gouvernementaux, se prépare à la meilleure protection possible pour nos citoyens, y compris les secouristes et le personnel médical. »
« New England Journal of Medicine », 12 septembre 2002, pp. 806 et 840.
D'autres affections liées au 11 septembre
En plus de ceux qui restent atteints de troubles respiratoires, 213 autres pompiers et secouristes demeurent encore en arrêt de travail pour des troubles liés au stress, selon un rapport du CDC (Centers for Disease Control and Prevention, Atlanta). Ces troubles ont été multipliés par 17 dans les onze mois suivant l'attentat.
Une autre étude du CDC, publiée lundi, suggère que des centaines de personnes habitant près des tours ont présenté des symptômes persistants incluant des irritations de nez et de gorge. Et des milliers d'autres pourraient avoir souffert de stress post-traumatique.
Enfin, jusqu'à 200 000 enfants new-yorkais pourraient présenter des troubles psychiatriques (anxiété, phobies), selon le New York Psychiatric Institute.
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