Des questions
Les tumeurs cérébrales constituent une des pathologies les plus difficiles à appréhender pour les soignants en cancérologie.
L’atteinte fréquente des fonctions cognitives lors des tumeurs cérébrales pose de nombreux problèmes éthiques, en particulier celui du choix de la stratégie thérapeutique. La difficulté d’accès au consentement de soins et l’incertitude des séquelles post-thérapeutiques rendent problématique l’élaboration d’un projet de soins. L’attitude éthique attendue pour la mise en place de ce projet a pour objectif de répondre à différentes questions : qui dit quoi et à qui ?, qui décide quoi et comment ?, qui assume quoi et de quelle façon ? Elle requiert pour cela un temps d’analyse suivi de la mise en marche des procédures décisionnelles.Les réponses dépendent étroitement des cas cliniques.
Deux types de pathologie
Deux types de pathologie peuvent être différenciés : les gliomes de bas grade et les gliomes de haut grade.
Le diagnostic d’un gliome de bas grade survient chez un sujet jeune en possession de tous ses moyens. L’annonce de l’existence d’une tumeur cérébrale évolutive, qui va devenir rapidement agressive et provoquer des troubles cognitifs, impose la mise en place d’un traitement. A-t-on le droit de proposer d’emblée un geste chirurgical pouvant entraîner de graves séquelles ? Suivant le caractère du patient, la démarche sera différente : soit le patient ne supporte pas l’idée d’une tumeur et décide son exérèse quoi qu’il arrive, soit il est moins impulsif et, après une réflexion rationnelle, refuse l’opération en connaissance de cause. Enfin, il existe des patients indécis, qui doutent et changent d’avis. C’est la multiplication des consultations qui orientera le soignant vers une attitude plus paternaliste ou plus directive. Gagner du temps en proposant une vérification diagnostique permet souvent de dédramatiser une situation et de permettre au patient de prendre du recul.
Le rôle du neurologue, véritable «généraliste du cerveau», prend ici toute son importance : accompagner le patient et servir de relais lors des réflexions et des concertations pluridisciplinaires.
Lorsque se pose le diagnostic de gliome de haut grade, le malade présente déjà des troubles cognitifs. D’autres questions se posent alors : comment estimer correctement les capacités de décision du patient ? que dire à un malade dont les troubles ont complètement régressé après l’opération, quand il a six à huit mois de survie et qu’il se croit guéri ? quelles seront les variations de ses fonctions intellectuelles après l’opération ? Dans ces conditions, comment assurer une réponse au problème éthique : « Qui dit quoi, à qui ? »
La place de la famille est ici prépondérante. Il importe de choisir une personne de confiance, qui deviendra l’interlocuteur privilégié, capable d’évaluer au mieux les capacités cognitives du patient. Il faut tout lui dire en s’assurant que toute l’équipe de soins tient le même discours, puis ne pas oublier que la personne a aussi besoin d’être aidée. La notion de « soins de support »* prend ici toute sa valeur. C’est l’accompagnement qui est le plus important : il faut vivre « au jour le jour » avec le patient et son entourage et constamment s’adapter.
D’après une table ronde : « Tumeurs cérébrales et troubles cognitifs : réflexion éthique », sous la présidence du Dr D. Frappaz (Lyon), avec les Drs D. Hoffman (Grenoble), J. Guyotat (Lyon), J. Bouillat (Bourg-en-Bresse), M. Levy-Soussan (Paris) et B.-M. Duffet (Lyon), lors des 3es Journées nationales de soins de support en oncologie.
* Soins de support : ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades, parallèlement aux traitements spécifiques, lorsqu’il y en a, tout au long des maladies graves.
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