APRES UN MOIS DE BOYCOTT, les 230 internes en médecine générale de la faculté de médecine de Toulouse devraient choisir leurs terrains de stage aujourd'hui ou demain. Le dialogue a été renoué avec la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales (Drass) de Midi-Pyrénées (« le Quotidien » du 8 avril). Anne Mandonnaud, vice-présidente de l'Association des internes de médecine générale de Midi-Pyrénées (Aimg-Mp) ne veut pourtant pas crier victoire : « J'attends d'avoir sous les yeux la liste des postes qui nous seront proposés. »
Dans un courrier adressé à la Drass, les résidents toulousains s'étaient plaints du maintien au centre hospitalier universitaire de Toulouse de nombreux stages à la valeur pédagogique très discutable pour de futurs généralistes. Ils demandaient l'ouverture de seize postes de gynécologie-pédiatrie et le rétablissement des douze stages chez le praticien initialement fermés pour créer des services universitaires de médecine générale ambulatoire (Sumga). « Nous ne voulons pas servir de bouche-trous pendant six mois dans le service d'un CHU, mais choisir des postes qui présentent un réel intérêt pour notre futur métier », insiste Anne Mandonnaud.
En quarante-huit heures, l'Aimg-Mp a reçu le soutien de vingt-huit associations d'internes de médecine générale. La preuve que le conflit qui se joue dans la ville rose est un peu l'affaire de tous les résidents. « Beaucoup ne parviendront pas à réaliser les trois semestres obligatoires en médecine d'adultes, en gynécologie-pédiatrie et en médecine d'urgence, prévus par le décret du 19 octobre 2001 », souligne Olivier Marchand, président de l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes en médecine générale (Isnar-Img). Beaucoup ? Selon une enquête réalisée par le syndicat auprès des associations de résidents de vingt-six facultés, 40 % des internes en médecine générale ne parviendraient pas à boucler leur formation. « En 2004, sur les 2 000 étudiants en médecine générale, entre 700 et 900 ne valideront pas leur cursus », explique Olivier Marchand.
Situation critique à Paris.
Le problème ne se pose pas de la même façon dans toutes les facultés de l'Hexagone. A Bordeaux ou à Angers, la situation est critique. A Paris, également, puisque seulement une centaine d'étudiants sur les 1 300 actuellement en résidanat pourraient boucler leur maquette. Selon Olivier Marchand, ce résultat s'explique par les « fortes pressions des chefs de service des établissements de l'Assistance publique sur la Drass pour obtenir des internes de médecine spécialisée plutôt que de médecine générale ».
Dans certaines régions où l'Isnar-Img est représentée, les commissions d'ouverture ou d'adéquation de terrains de stages ressemblent à « des batailles de tranchées entre les directeurs de CHU, des départements de médecine générale et les internes ». De l'avis d'Olivier Marchand, ces derniers sont considérés comme « la chair à canon de l'hôpital, que l'on dispose selon le besoin ». Vice-président du syndicat des résidents de Paris, Karim Takhi, s'inquiète également du peu d'intérêt des Drass pour la formation des futurs généralistes : « Actuellement, elles n'effectuent aucun contrôle sur la réalisation de la maquette pédagogique des résidents. Pourtant, en théorie, le directeur du département de médecine générale peut refuser de valider le troisième cycle d'un étudiant au motif qu'il n'a pas réalisé tous les stages obligatoires. »
A Marseille, à Amiens ou à Rennes, l'intégralité des résidents peut prétendre boucler sa formation. « Les rapports constructifs entre le département de médecine générale, la Drass et les représentants des internes y sont pour beaucoup », constate Benoît Suply, de l'Association des résidents de la faculté de médecine de Rennes (Arfmr).
Le déficit des stages en gynécologie.
Près de trois ans après la publication du décret qui instaure la nouvelle formation en médecine générale, Olivier Marchand regrette que les résidents ne disposent pas des moyens pour la réaliser. « On ne peut pas assurer aujourd'hui aux étudiants des futures promotions qu'ils trouveront tous un stage en gynécologie », s'inquiète-t-il. Avec seulement 150 postes proposés chaque semestre, les 2 000 internes en médecine générale ne pourront en effet pas tous se former dans cette spécialité. « C'est inquiétant car les médecins généralistes sont amenés à jouer un rôle important dans le suivi gynécologique des femmes, surtout en campagne. » Avec l'augmentation programmée de 800 internes à la prochaine rentrée universitaire, Olivier Marchand craint que la situation ne s'aggrave. Les Drass devront, selon lui, se pencher sérieusement sur la question. Car, en décidant des terrains de stage proposés aux résidents, « elles sont responsables de la qualité de la formation des médecins de demain ».
Le flou du sixième semestre
Mis en place en novembre 2003 dans de nombreuses facultés, le sixième semestre de stage de médecine générale deviendra effectif pour tous les résidents à partir du mois de mai. En l'absence de circulaire précisant son contenu, il reste « encore très flou », précise Benoît Suply. Le porte-parole de l'Isnar-Img met en garde contre le danger de voir ce stage dériver vers des remplacements déguisés : « Le sixième semestre réalisé dans le cadre des services universitaires de médecine générale ambulatoire (Sumga) doit respecter les propositions du groupe Nemitz et rester formateur pour les résidents. »
Les Sumga pourront-ils accueillir tout le monde ? « Cette année, oui, répond Benoît Suply, mais ce stage transitoire entre les études et la pratique en autonomie de la médecine générale devrait intéresser de plus en plus de résidents dans les années à venir. »
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