Des spécificités chez l'enfant

Publié le 28/02/2007
Article réservé aux abonnés

LES TRAUMATISMES crâniens de l'enfant (TCE) sont fréquents. Selon les données de l'étude Aquitaine, rappelées récemment par une équipe lyonnaise (1), leur incidence annuelle est de 294 pour 100 000 chez les enfants de moins de 15 ans, avec un pic à 350/100 000 avant l'âge de 1 an. L'extrapolation des données américaines à la France aboutit à un chiffre de 20 000 nouveaux TCE par an (2).

Chutes et accidents de la circulation représentent des causes importantes de ces événements.

Comme chez l'adulte, la gravité initiale des TCE est évaluée sur la base du score de Glasgow. Schématiquement, 8 fois sur 10, il s'agit de TC légers, les 20 % restants se répartissant à part égale entre TC modérés et graves. Le ministère de la Santé souligne l'importance des TCE graves en termes de santé publique. Ces traumatismes constituent, en effet, «la troisième cause de mortalité avant 1an et la première au-delà».

A l'instar des TCE sévères, les TCE modérés peuvent entraîner des séquelles neurocognitives, avec un risque plus ou moins important de handicap. Dans le cas particulier des sévices à enfant, il existe une différence marquée de la mortalité selon qu'il existe ou non un TC : 7 % sans TC versus 20-40 % (2).

Particularités anatomophysiologiques.

Les spécificités lésionnelles des TCE s'expliquent par les particularités anatomophysiologiques à cette période de la vie. L'enfant se distingue de l'adulte par un rapport poids de la tête/poids du corps plus important, des espaces péricérébraux plus importants, une myélinisation incomplète et une dure-mère plus fixée, ainsi que par une compliance et une élasticité de la boîte crânienne plus grandes (1). D'où des différences du type de lésions provoquées par les TC, avec une plus grande fréquence des lésions osseuses et, à l'inverse, moins d'hématomes intracrâniens.

En ce qui concerne les examens d'imagerie dans les TCE, quand ils sont indiqués, les radiologues s'accordent à dire que «la tomodensitométrie constitue le moyen le plus simple d'exclure une lésion cérébrale significative» (3). Le Pr Cohen fait remarquer à ce propos que «la suspicion de maltraitance reste une des rares indications de la radiographie du crâne (face et profil), dans le contexte du squelette entier, le plan de coupe du scanner pouvant être parallèle à l'axe des fractures, les rendant invisibles».

Fracture du crâne.

Un squelette entier est ainsi pratiqué dès qu'il y a suspicion de traumatisme non accidentel avant l'âge de 2 ans et en cas de « très forte suspicion » entre 2 et 5 ans. Au-delà de 5 ans, il n'y a pas de consensus, et la décision est prise en fonction des résultats de l'examen neurologique. «Dans ce cas, écrit une équipe rouennaise, la découverte d'une fracture du crâne peut être en effet un élément déterminant pour la prise en charge en confirmant la réalité d'un traumatisme suspecté, mais non prouvé.» (4)

«Les fractures du crâne typiques, en dehors des traumatismes non accidentels, ne sont pas fréquentes», précise le Pr Cohen : ce sont classiquement des fractures linéaires, localisées au niveau de l'os pariétal, mesurant moins de 3 mm et ne traversant pas les sutures. Les fractures du crâne très évocatrices de maltraitance sont celles en coquille d'oeuf, les embarrures, les fractures de plus de 4 mm, les fractures stellaires, celles qui traversent les sutures et les fractures de l'os occipital.

En outre, «un scanner cérébral doit être pratiqué en période aiguë, suivi, très vite, même s'il est normal, d'une IRM. Cet examen est excellent pour révéler la présence d'hématomes d'âges différents», explique le Pr Cohen.

A noter qu'il ne permet pas une datation précise des hématomes, mais seulement d'affirmer leur caractère ancien ou récent. L'IRM est également beaucoup plus sensible pour la mise en évidence des petites lésions cérébrales parenchymateuses qui pourraient passer inaperçues au scanner. Le bilan en cas de suspicion de maltraitance comporte également un fond d'oeil à la recherche d'hémorragies rétiniennes.

«Les rares descriptions d'hémorragies rétiniennes en dehors des traumatismes non accidentels concernent les accidents de voiture extrêmement graves et certains enfants en réanimation.»

Enfin, deux diagnostics différentiels doivent être connus : la rare insensibilité congénitale à la douleur et l'ostéogenèse imparfaite (maladie des os de verre), dans sa très rare forme modérée.

La prévention des TCE est d'autant plus importante qu'ils peuvent entraîner des séquelles «souvent invisibles et méconnues, en particulier chez le nourrisson» (1).

Elle repose, entre autres, sur la prévention des accidents de la vie courante (défenestration, chute de la table à langer, chute de bicyclette…) et sur des mesures destinées à réduire le risque au cours des accidents de la route (port de ceinture, rehausseur adapté à l'âge…).

(1) Javouhey E et coll. « Archives de pédiatrie » 2006 ; 13 : 528-531.
(2) Bonnier C. « Archives de pédiatrie » 2006 ; 13 : 531-533.
(3) Guide du bon usage des examens d'imagerie médicale. Sociétés françaises de radiologie (SFR) et de biophysique et de médecine nucléaire (Sfbmn). 2005. (4) Le Dosseur P et coll. Traumatisme ostéoarticulaire : quand et comment radiographier. www.sfipradiopediatrie.org/EPUBRU02/LEDBRU02.HTM.

> Dr CATHERINE FABER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8116