DANS CE TERRITOIRE grand comme la France, la guerre civile qui, en un an, a tué 100 000 personnes et en a « déplacé » 750 000 est censée avoir pris fin avec la signature, le 8 avril, d'un accord de cessez-le feu conclu entre le gouvernement soudanais et les organisations de la rébellion (Mouvement pour la justice et l'égalité et Mouvement de libération du Soudan). C'est ce qu'avait affirmé le président soudanais Omar al-Béchir, en visite la semaine dernière dans la région. Mais les médiateurs du conflit démentent que les armes se soient tues. Contrairement aux engagements passés entre belligérants, les milices arabes pro-Khartoum djandjawids n'ont pas désarmé. Selon un membre de la médiation tchadienne, « cette milice opère même contre la population tchadienne ».
« Les djandjawids sont venues attaquer la population civile à Koulbous-Tchad », a déclaré un conseiller diplomatique du président tchadien, qui a précisé qu'un civil de son pays avait été tué et plusieurs autres blessés au cours d'une attaque.
Des opérations de nettoyage ethnique.
Un responsable de l'ONU a accusé ces milices de perpétrer des « atrocités » et des « opérations de nettoyage ethnique contre les populations non arabes du Darfour ».
« Au lieu de désarmer les djandjawids, Khartoum est en train de les cantonner dans quatre sites pour les intégrer dans l'armée » soudanaise, accuse le porte-parole militaire des rebelles. Une situation jugée d'autant moins acceptable que l'armée soudanaise tolère et offre un appui terrestre et arien aux milices djandjawids.
Dans un communiqué, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'émeut devant ce qui constitue aujourd'hui « la première urgence humanitaire au monde. » Le taux de mortalité quotidienne des enfants atteindrait actuellement 6,7 pour 1 000, un niveau plusieurs fois supérieur à ce qu'il est en temps normal dans cette région très pauvre et très exposée. En plus des blessures de guerre, les diarrhées, troubles respiratoires et autres maladies infectieuses prolifèrent.
Selon Médecins sans Frontières, dont les équipes sont présentes dans plusieurs localités du Darfour, « malgré les annonces de secours, l'aide est très insuffisante, la mobilisation se fait attendre et les rares organisations opérationnelles ne peuvent couvrir l'ensemble des besoins ».
En particulier, les réfugiés ne bénéficient d' « aucune assistance alimentaire et les abris et l'eau potable leur manquent drastiquement », tandis que « l'accès aux soins est extrêmement limité. »
MSF a notamment constaté « des centaines de cas de rougeole chez les enfants de déplacés » et a engagé une campagne de vaccination pour enrayer le risque d'une épidémie massive.
De son côté, le Comité international de la Croix-Rouge (Cicr) confirme que la situation humanitaire est « grave » et que les besoins de la population sinistrée sont « grands, pressants et loin d'être couverts par les capacité actuelles des agences humanitaires ». Selon le délégué à la communication de l'organisation, le Cicr, en association avec le Croissant-Rouge soudanais (CRS), ainsi qu'avec les autorités locales et fédérales, « une assistance matérielle, en particulier des abris, a pu à ce jour être fournie à seulement 42 000 déplacés » ; l'accès à l'eau potable n'étant assuré que pour 72 000 personnes, aussi bien des déplacées que des résidents, y compris les communautés arabes affectées par le conflit.
Le secrétaire d'Etat américain, Colin Powell, exhorte les autorités de Khartoum à faire avancer les discussions de paix qui se déroulent depuis plusieurs mois au Kenya, avec les représentants de l'Union africaine et de l'Union européenne.
Alors que des visas viennent enfin d'être accordés aux responsables de l'Agence américaine pour le développement international (Usaid), le porte-parole adjoint du département d'Etat, Adam Ereli, qualifie de « fiables » les informations selon lesquelles des civils innocents sont actuellement victimes d'exactions de la part des milices arabes.
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