EN JUILLET DERNIER, le Collectif interassociatif sur la santé (Ciss) faisait part de son impatience : le texte homologuant les recommandations de bonnes pratiques pour l'accès aux informations de santé, prévue par la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades, était « bloqué » par le ministère. Le groupe de travail mis en place par l'Anaes, composé de professionnels de santé et de représentants des usagers, était pourtant parvenu à un consensus quatre mois auparavant. Le Ciss, ne se sentant plus tenu à l'obligation de réserve, rendait alors public le texte arrêté par le groupe de travail.
Le texte définitif est enfin paru. Un arrêté du 5 mars, publié au « Journal officiel » du 17, homologue les « recommandations de bonnes pratiques relatives à l'accès aux informations concernant la santé d'une personne, et notamment l'accompagnement de cet accès ». Le Ciss regrette ce retard, qui a contraint les hôpitaux à s'organiser chacun de son côté, en notant que le texte définitif ne présente pas de grandes différences avec le consensus adopté il y a plus d'un an.
Quelles informations ?
Qu'apporte ce texte ? Il s'agit, précise son préambule, « de contribuer par des mesures organisationnelles et de bonnes pratiques à l'exercice d'un droit reconnu par la loi ».
Il définit d'abord les informations de santé auxquelles le patient peut accéder. Ce sont les informations « auxquelles est donné un support (écrit, photographie, enregistrement, etc.) avec l'intention de les conserver ». On parlera par commodité de « dossier » du patient, terme qu'il ne faut pas envisager de manière restrictive car toutes les informations formalisées détenues par un professionnel, un établissement de santé ou un hébergeur* en dehors du dossier sont communicables . Seules peuvent ne pas être communiquées par le médecin les notes dites « personnelles », celles qui « ne sont pas destinées à être conservées, réutilisées ou, le cas échéant, échangées, parce qu'elles ne peuvent contribuer à l'élaboration et au suivi du diagnostic et du traitement ou à une action de prévention ».
Information et qualité des soins.
Le droit du patient d'accéder a posteriori à son dossier ne dispense pas le professionnel de santé du « devoir de communiquer régulièrement à la personne les informations pertinentes concernant sa santé ». « L'information fait partie intégrante de la relation de soin », souligne l'Anaes. Une information en temps utile et bien faite devrait limiter le recours a posteriori au dossier, lequel peut dans certains cas, qu' « un instantané de l'histoire médicale d'une personne ».
Pour les professionnels de santé, souligne l'Anaes, le dossier constitue d'abord un instrument de travail et d'échanges avec les autres professionnels, il est en cela « un élément de la qualité des soins ».
Les patients doivent être informés de la façon dont ils peuvent accéder à leur dossier (livret d'accueil dans les établissements de santé, livret ou affiche dans les cabinets privés, etc.). La plupart des demandes peuvent se faire oralement dans le cadre de la relation de soin. « Il convient d'y répondre, disent les recommandations, et ce processus doit être encouragé. »
Des délais sont prévus pour la communication des données : au plus tôt après un délai de réflexion de 48 heures, au plus tard dans les 8 jours suivant la demande, 2 mois quand il s'agit d'informations datant de plus de 5 ans et dans des cas particuliers des hospitalisations psychiatriques.
Consultation sur rendez-vous.
Lors d'une demande d'information a posteriori, la communication du dossier peut pallier un déficit antérieur d'information. Il est alors recommandé, pour faciliter l'accès au dossier et la compréhension des informations, une consultation sur rendez-vous ou, si la personne ne peut se déplacer, l'accès au dossier par l'intermédiaire d'un médecin de son choix. Un suivi doit être organisé si nécessaire.
D'un point de vue très pratique, les établissements de santé pourraient prévoir un espace de consultation adapté et des modalités permettant d'éviter vols, dégradations ou falsifications... La consultation du dossier sur place est gratuite, dit la loi. En cas de demande de copies, seuls les coûts de reproduction et d'envoi peuvent être facturés et, dit l'Anaes, « il convient de se limiter au coût du consommable et de l'amortissement du matériel ». Et il faut prendre en considération le cas des demandeurs démunis, qui ont les mêmes droits d'accès.
Comme le fait de fixer le droit à l'information dans la loi, ces recommandations de bonnes pratiques sont utiles. Mais elles ne changent pas fondamentalement la donne. Depuis 2002, on n'a pas assisté à une montée en flèche de demandes d'accès au dossier. C'est au médecin, aujourd'hui comme hier, de décrypter la demande d'informations du patient et d'y répondre sans avoir nécessairement besoin de recourir à la loi.
* Un décret sur les conditions d'agrément des hébergeurs est en cours d'élaboration.
Les cas particuliers
- Les ayants droit d'une personne décédée peuvent - sauf volonté contraire de celle-ci exprimée avant son décès - avoir accès au dossier dans la mesure où les informations leur sont nécessaires pour connaître les causes de la mort, défendre la mémoire du défunt ou faire valoir leurs droits.
- Les malades hospitalisés en psychiatrie ont un accès direct aux informations de santé recueillies dans le cadre de leur hospitalisation. A titre exceptionnel et en cas de risques d'une gravité particulière, cet accès peut être subordonné à la présence d'un médecin désigné par le demandeur ou soumis à l'avis de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques. Les proches n'ont pas de droit d'accès au dossier, mais, en cas de diagnostic ou pronostic grave, « le secret médical ne s'oppose pas » à ce qu'ils reçoivent les informations leur permettant d'apporter un soutien direct au malade.
- Dans le cas des mineurs, ce sont les titulaires de l'autorité parentale qui ont le droit d'accès au dossier. Le mineur peut demander que l'accès ait lieu par l'intermédiaire d'un médecin ou s'opposer à la demande lorsqu'il a sollicité et obtenu seul des soins. Le médecin l'informera de cette possibilité car « la perspective d'une révélation à ses parents du motif de son recours au professionnel de santé ne doit pas le dissuader de se faire soigner ». Si la demande d'accès émane du mineur lui-même, il a droit à une information et « de participer à la prise de décision le concernant d'une manière adaptée à son degré de maturité ».
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