Des recherches pour comprendre l'adaptation du système cardio-vasculaire à la microgravité

Publié le 04/11/2001
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De notre envoyée spéciale

Depuis le début des vols spatiaux habités, la mise en orbite de plusieurs centaines d'astronautes a confirmé les possibilités d'adaptation des humains dans cet environnement spécifique. Si la microgravité est l'un des éléments les plus marquants associés à l'espace, l'isolement et le confinement physique et social représentent d'autres facteurs à prendre en considération.

Au cours des vols dans l'espace, l'organisme s'adapte à son nouvel environnement et se retrouve ainsi « déconditionné » à la vie sur terre. On connaît maintenant mieux les conséquences médicales des vols : symptômes neuro-sensoriels (mal de l'espace durant les premiers jours de vol, mal des transports, difficultés à la marche et à l'équilibre lors du retour sur terre), déconditionnement cardio-vasculaire, hypotension orthostatique et diminution des capacités physiques à l'effort.
L'intolérance à l'orthostatique dans les suites d'un vol spatial est liée à l'impossibilité de maintenir une perfusion cérébrale adéquate. Les vols dans l'espace, en effet, s'accompagnent d'une élimination des gradients de pression hydrostatique physiologique descendante et provoquent une redistribution des fluides vasculaires vers la partie supérieure du corps (extrémités supérieures et région thoraco-céphalique). Cette modification est nette tant au niveau intravasculaire qu'au niveau du compartiment extravasculaire. « Cliniquement, ces modifications se traduisent par un œdème de la face et du tronc et, de ce fait, par une modification de certains sens (olfaction et goût)», explique le Dr Atkov (Moscou). Outre cette redistribution axiale du volume sanguin, on assiste à une baisse des volumes circulants : en conditions de microgravité, le volume plasmatique, dans un premier temps, puis le volume globulaire sont restreints.
La redistribution volumique rapide entraîne des modifications cardio-vasculaires dès le premier jour de vol : dilatation initiale des vaisseaux profonds et majoration du volume d'éjection cardiaque et de la pression veineuse centrale. Certaines des variations cardio-vasculaires participent à l'intolérance à l'orthostatisme : réduction du volume plasmatique, sensibilité des baroréflexes, majoration de la compliance veineuse, en particulier au niveau des membres inférieurs. Lors des missions spatiales prolongées, il existe en outre une atrophie musculaire attigeant dans un premier temps les muscles luttant contre le gravité. Il s'y ajoute des phénomènes de décalcification de la colonne vertébrale et des membres inférieurs.

Prévenir le déconditionnement

Afin de mieux comprendre les modifications des paramètres cardio-vasculaires dans l'espace et d'imaginer des stratégies pour en limiter les effets à court et à moyen terme, différentes équipes dont celle du CNES (Drs G. Gauquelin-Koch, D. Cauquil et A. Guell) ont étudié des sujets en station couchée prolongée (modèle terrestre le plus proche des conditions spatiales). Ils ont pu déterminer que dans cette position, il existe une baisse de flux circulatoire au niveau des membres inférieurs et une relative stagnation du sang veineux à ce niveau. La pratique d'examens Doppler artériels a montré une vasoconstriction des artères des membres inférieurs.
En outre, lorsque la position allongée est maintenue, les mesures pléthysmographiques montrent une majoration du volume des jambes et des mollets liée à une accumulation de liquide extravasculaire en rapport avec une dilatation des veines à ce niveau.
L'équipe du CNES a mis en place un programme spécifique (French Cardio-Vascular Program) à l'attention des astronautes rejoignant l'ISS (Station spatiale internationale) afin de mesurer de façon régulière au cours des vols de longue durée certains paramètres cardio-vasculaires : pression artérielle systolique et diastolique, fréquence cardiaque, intervalle RR, paramètres permettant une estimation de la redistribution des fluides, flux sanguin cérébral, etc.
Les médecins français travaillent aussi, actuellement, à la mise au point de matériels de diagnostic - en particulier échographes et Doppler - dans le but de faire face à d'éventuels situations pathologiques lors de voyages de longue durée (ISS et, plus tard, voyages vers Mars). A cette fin, un bras robotique est en cours de développement. Le but est de pouvoir manœuvrer ce bras à distance, aidé par du personnel non médical présent au lit du patient.

D'après les communications des Drs Gauquelin-Koch, Cauquil et Guell (CNES) lors du 52e Congrès international astronautique à Toulouse et du Dr Oleg Atkov (Moscou) lors de la première journée Médecine et espace à Béziers.

Appel à 14 nouvelles candidatures

Pour la deuxième campagne de « bed rest » qui doit commencer en mars 2002 à la clinique spatiale du MEDES, à Toulouse, l'Agence spatiale européenne, en association avec le Centre national d'études spatiales (CNES), recherche 14 nouveaux candidats qui devront être disponibles au total pendant quatre mois.
Citoyens européens, de sexe masculin, ils devront avoir entre 25 et 45 ans, mesurer entre 1,65 m et 1,85 m, ne pas fumer ni suivre de traitement médicamenteux et, bien sûr, être très motivés.
Les personnes intéressées peuvent obtenir de plus amples informations sur les critères exigés et les formalités de sélection en téléphonant au 05.62.19.28.96 ou en consultant le site Internet www.medes.fr (les candidatures en ligne seront traitées plus rapidement).

Dr Isabelle CATALA

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7002