Pronostic des hépatocarcinomes
UNE ETUDE DE POPULATION a été menée par le Dr Frédéric Borie, le Dr Brigitte Trétarre (Registre des tumeurs de l'Hérault, Montpellier) et Francim (Réseau français des registres de cancers) sur les 1 007 nouveaux cas de tumeur primitive du foie recensés dans neuf départements français* de 1997 à 1998. Elle a permis d'évaluer les pratiques de soins et leur impact sur la survie des hépatocarcinomes.
Sur le plan épidémiologique, l'âge moyen des patients porteurs d'un hépatocarcinome était de 67,5 ans et le sex-ratio était de cinq hommes pour une femme, sans disparité géographique. Le taux moyen d'incidence variait de 9 à 21 pour 100 000 habitants chez les hommes et de 4,5 à 4 pour 100 000 habitants chez les femmes. Une cirrhose était présente chez 79 % des patients, sachant que le foie n'était pas toujours sain chez les autres malades. Elle était plus souvent d'origine alcoolique (61,5 %) que consécutive à une infection virale (21 %) avec, cette fois, une disparité géographique. L'origine virale était plus fréquente dans le Sud de la France, avec des taux de 44 % et 43 % dans les départements de l'Hérault et du Tarn. Le virus de l'hépatite C était le responsable dans 75 % des cas.
L'hépatocarcinome a été découvert de façon fortuite ou dans le cadre d'un suivi d'une hépatopathie dans 34 % des cas. Dans 62 % des cas, il a été diagnostiqué à l'occasion de la survenue d'une symptomatologie. Il s'agissait d'une forme diffuse chez 21,5 % des patients et il existait des métastases à distance au moment du diagnostic chez 13 % des malades. Le diagnostic d'hépatocarcinome a été posé d'après les résultats de l'étude histologique (55 %), du dosage de l'alpha foetoprotéine (20,5 %) ou de l'imagerie (24,5 %)
En ce qui concerne la prise en charge thérapeutique, 85 % des patients n'ont été traités que de façon palliative et seulement 15 % ont bénéficié d'un traitement à visée curative. Ce dernier a reposé sur la transplantation hépatique (16 %), la résection chirurgicale hépatique (70 %) ou sur une alcoolisation selon des critères bien définis (14 %).
La transplantation hépatique, meilleur traitement curatif.
La survie à cinq ans après traitement à visée curative a été de 35,5 % : 67 % après transplantation hépatique, 29 % après résection chirurgicale. En revanche, elle n'a atteint que 2 % après traitement palliatif. Autrement dit, remarque le Dr F. Borie, « la transplantation hépatique est le meilleur traitement à visée curative de l'hépatocarcinome ». Le jeune âge et un stade Okuda à 1 ou un stade de Child A (pour les patients ayant une cirrhose) étaient des critères associés au recours à des traitements à visée curative. On remarque également que les malades ayant bénéficié d'un tel traitement étaient préférentiellement pris en charge dans les centres spécialisés. Pour les patients ayant reçu un traitement palliatif, une certaine hétérogénéité a été observée selon les départements. Cette évidente diversité thérapeutique va du simple traitement symptomatique (antalgique, corticoïdes, etc.) à la chirurgie palliative, en passant par l'alcoolisation, la chimioembolisation, l'hormonothérapie, la chimiothérapie intra-artérielle ou systémique, le lipiodol radioactif, voire une association de ces différentes thérapeutiques. Néanmoins, cette variabilité géographique témoignant de l'absence de véritable consensus n'a pas eu d'impact sur la survie et le pronostic des hépatocarcinomes à un stade avancé.
Outre l'âge, le stade Okuda, l'alpha foetoprotéine, le nombre et la taille de la ou des tumeurs et la présence ou non de métastases, l'absence de symptômes ou la découverte dans le cadre du suivi d'une hépatopathie se sont révélés être des facteurs indépendants de bon pronostic.
D'après un entretien avec le Dr Frédéric Borie, service de chirurgie digestive A, hôpital Saint-Eloi, CHU de Montpellier, et Registre des tumeurs de l'Hérault.
* Bas-Rhin, Calvados, Côte-d'Or, Haut-Rhin, Hérault, Isère, Saône-et-Loire, Somme, Tarn.
Il faut améliorer la prévention
Plus de 85 % des patients ne reçoivent qu'un traitement palliatif et parmi eux 50,5 % ne bénéficient que d'un traitement symptomatique. Il apparaît donc nécessaire d'améliorer la prise en charge des hépatocarcinomes (en l'absence de nouvelle thérapeutique efficace) par la mise en place de campagnes de prévention : prévention primaire visant à réduire l'incidence des cirrhoses et des hépatites virales (campagnes antialcool et antidrogues, vaccinations, etc.) ; prévention secondaire en améliorant le suivi des patients porteurs d'une cirrhose de façon à dépister les hépatocarcinomes et à proposer un traitement à visée curative le plus tôt possible ; prévention tertiaire en facilitant la transplantation hépatique par des campagnes en faveur des dons d'organes.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature