C’EST SUR FOND de revendication qu’ont été remis, lors de la 7e Journée d’économie de la santé, les prix GSK (Laboratoire GlaxoSmithKline). «En France, on a beau avoir l’espérance de vie la plus élevée du monde après 60ans, l’un des meilleurs systèmes de santé au monde, il y a encore du pain sur la planche!», assène d’entrée Didier Eyssartier (Direction générale de la santé, DGS). Axées sur la politique de prévention, ces rencontres ont dépeint une médecine en quête de sens, à la recherche «d’un nouvel exercice du métier». Alors que les disparités dans l’accès à la prévention sont criantes – on en mesure l’écart avec une mortalité infantile de 7,8 pour 1 000 outre-mer et de l’ordre de 4 pour 1 000 en métropole –, le débat éco-médical est rapidement entré dans le vif du sujet : la prévention doit-elle être menée pendant une consultation classique ou faire l’objet d’une séance en particulier ? Ça et là, on penche pour la première solution. «Lorsque la prévention se fait dans le cadre d’une consultation, son coût marginal est nul», indique Annie Chicoye (Aremis, Neuilly-sur-Seine), tandis que Thérèse Lebrun (institut catholique de Lille) prône «une approche globale du patient où la prévention et le soin sont dans une même chaîne».
Une approche multidisciplinaire.
Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que le prix GSK d’économie de la santé soit remis au travail d’Isabelle Borget (institut Gustave-Roussy, Villejuif), qui mène des recherches doctorales sur « l’optimisation de la prise en charge globale des patients atteints d’un cancer de la thyroïde », tandis qu’Horace Roman (Inserm U149, Paris) voyait son travail sur « l’obésité maternelle précédant la grossesse et le risque de césarienne » couronné du prix d’épidémiologie Henri-Philippart.
La remise des prix était le pic de la journée. Pour l’éducation et les jeunes chercheurs – les prix sont remis, depuis trois ans, à des doctorants ou à des post-doctorants –, pour la polyvalence médicale. Car I. Borget et H. Roman font dans la « double casquette ». Elle est pharmacienne et poursuit sa carrière en milieu hospitalier, lui est clinicien et chercheur, à la fois neurochirurgien, gynécologue et obstétricien. «Une nécessité, indique le plus simplement du monde H. Roman. L’épidémiologie ouvre l’horizon du clinicien.»
La substance de leurs travaux ne se départit pas de cette approche multidisciplinaire. Avec une ouverture sur la prévention, la thématique de l’année. «Actuellement, le taux de personnes obèses est de 11% et touche les deux sexes, analyse H. Roman. Entre 30 et 45ans, âge où l’on est susceptible de procréer, il est même plus important chez les femmes. L’obésité maternelle a un impact sur les grossesses à risque, les obstétriciens sont amenés à les prendre en charge. Alors que 13% des femmes normopondérales subissent une césarienne, on atteint 28% avec celles ayant un index de masse corporel de 35-40. Pourquoi? L’obésité en elle-même semble être un facteur de risque. L’ouverture du col est-elle plus difficile? La gestion du travail d’une femme pesant 120-130kg n’est pas facile. Sans parler des complications pré- et postopératoires. Leur anesthésie pose plus de problèmes. Ces femmes font plus d’embolies pulmonaires et la cicatrice de césarienne s’infecte facilement. A la grossesse suivante, elles cumulent les risques de leur obésité et d’un utérus cicatrisé.»
Même pragmatisme, même du terrain chez I. Borget. «La mise sur le marché du thyrogène –TSH humaine recombinante– a changé la donne: une meilleure qualité de vie et une baisse des arrêts de travail. Mais la molécule coûte cher, pas moins de 1000euros par an. Il faut voir ce que l’on y gagne et ce que l’on y perd, les mettre dans la balance. Le thyrogène compense-t-il le surcoût des autres médicaments? Et il faut avoir à l’esprit que la détection des cancers est plus précoce du fait de nouvelles techniques médicales. Je veux être prospective sur le plan scientifique et humain.» Françoise Lebrun émettait le voeu d’une politique médicale rationalisée par les outils économiques : avec ces deux jeunes chercheurs, le mouvement est en marche.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature