D’ordinaire, les politiques et les professionnels de santé locaux se démènent pour lutter contre la désertification médicale. À Brossac (Charente), petit village de 600 habitants situé à 50 km au sud de Cognac, la problématique est telle que les patients se mobilisent à leur côté pour trouver la perle rare.
L’association « Soigner ma santé en Brossacais » (loi 1901) se bat depuis 16 mois pour retrouver un médecin généraliste. Depuis 2008, les 2 200 habitants du canton – dont beaucoup de personnes âgées en situation de précarité – en sont dépourvus.
À la tête de ce collectif de 312 patients, un médecin bat la mesure. Le Dr Marie-Thérèse Baudet a exercé pendant 30 ans la pédiatrie en service de protection maternelle infantile (PMI). Ce médecin retraité a « contacté, écrit, rencontré et sollicité » l’Agence régionale de santé (ARS) de Poitou-Charentes, le Conseil départemental de l’Ordre des médecins, le directeur des hôpitaux du Sud Charente, la caisse primaire, la MSA (régime agricole), les élus locaux (maires, collectivités territoriales, conseil municipal, la région)...
La lassitude a gagné la pédiatre qui s’est confrontée à ce « mille feuilles administratif ». « Personne ne fait preuve de mauvaise volonté, explique-t-elle au « Quotidien ». Je crois simplement que la pénurie médicale est tellement générale qu’on peut toujours trouver des zones plus défavorisées que la nôtre ».
Trois touches.
La mobilisation des habitants du canton a failli porter ses fruits. Deux fois. En 2012, un premier généraliste contacte l’association et propose ses services deux jours par semaine. « En contrepartie, ce médecin souhaitait travailler en collaboration avec les praticiens des cantons voisins, détaille le Dr Baudet. Il espérait aussi que Brossac soit défini comme zone sous-dotée par l’ARS, afin de bénéficier de certains avantages conventionnels ». L’allusion porte sur l’option « santé solidarité territoriale », qui encourage « les médecins installés dans les zones surdotées à proximité de zones sous-dotées à dégager une partie de leur temps médical pour prêter main-forte à leurs confrères ». En contrepartie d’un engagement à exercer au minimum 28 jours par an pendant trois ans, le médecin adhérant bénéficie d’une rémunération complémentaire et d’une prise en charge des frais de déplacement. « À Brossac, deux bureaux de consultation sont vacants dans notre maison médicale, mais nous ne rentrons pas dans les critères de l’ARS, regrette le Dr Baudet. Trois kilomètres plus loin, vous êtes en zone sous-dotée mais aucune structure ne peut accueillir un médecin ».
Quelques mois plus tard, une jeune médecin espagnole fait le tour du propriétaire avant de décliner l’offre à son tour. La mairie approche un généraliste roumain. Lui aussi fera faux bond.
Compagnonnage
Le temps presse. Bien que travaillant avec les médecins et patients des cantons alentours, les deux infirmières libérales et la pharmacienne de Brossac – membres de l’association – montrent chaque jour des signes plus grands d’inquiétude, estime le Dr Baudet. Qui croit connaître la solution : « Nous avons besoin d’un coup de pouce d’un généraliste voisin qui accepterait de guider le nouveau venu dans le cadre d’une collaboration libérale ou d’une association ». La requête a été formulée par les trois médecins français, espagnol et roumain qui ont visité Brossac... mais n’y sont pas restés.
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