Etudes épidémiologiques
LES ETUDES, essentiellement de prévalence, concernent surtout l'arthrose périphérique. Peu nombreuses, elles ont été menées principalement aux Etats-Unis (Nhanes) et au Pays-Bas (Zoetermeer). Il n'y a pas d'études en France, notamment pour la hanche et le genou. Certains travaux s'appuient sur la prévalence radiologique, d'autres sur les atteintes cliniques.
Une prévalence variable selon les pays.
Selon les pays, la prévalence varie entre 8 et 15 %. En Suède, chez les 50-70 ans, la fréquence globale est de 5,8 %. Maladie exceptionnelle chez les moins de 30 ans, elle commence à être fréquente à partir de 60 ans ; plus chez l'homme pour la hanche et chez la femme pour le genou. Une étude italienne a montré, chez les plus de 65 ans, des taux de 30 % pour le genou, 14 % pour la main et 8 % pour la hanche. L'étude de Framingham a permis de connaître la fréquence de l'arthrose radiographique : près de 30 % pour le genou chez les 70-80 ans et 44 % au-delà. L'arthrose de hanche est la plus invalidante : de 1 à 2 % d'arthrose symptomatique chez les plus de 40 ans, de 2 à 4 % d'arthrose radiographique ; les chiffres augmentant chez les personnes plus âgées. Quant à l'arthrose de la main, sa fréquence varie de 10 % chez les 40-50 ans à 90 % chez les femmes de plus de 70 ans.
L'arthrose a une composante génétique forte. Des associations de gravité, comme les agrégations familiales, ont été observées. Le surpoids et l'obésité, facteurs de risque bien connus, s'accompagnent d'une atteinte dégénérative cartilagineuse. Une équipe de Nancy* a montré que la leptine, une hormone impliquée dans l'obésité, joue probablement un rôle dans le développement de l'arthrose. Or on peut agir sur ce paramaètre pour faire reculer la symptomatologie : la diminution du poids entraînant une réduction de la douleur et un ralentissement de la progression de l'arthrose. Les facteurs professionnels jouent un rôle important : les métiers exposant à des vibrations sollicitant les articulations portantes sont associés à des atteintes plus fréquentes. Il en est de même pour les traumatismes ou les activités sportives trop intenses : un traumatisme sportif de la hanche dans la jeunesse multiplie par 8 le risque de développer une arthrose. Des associations entre le tabagisme et le développement de l'arthrose ont été retrouvées. Enfin, la prise d'estrogènes aurait un effet protecteur.
Des facteurs de risque associés à la vitesse de progression.
La rapidité d'évolution de l'arthrose est variable. Des facteurs sont associés à la vitesse de progression : le sexe féminin, l'obésité, les formes à nodules, la prise d'anti-inflammatoires (en supprimant la douleur, le patient protège moins son cartilage) pour l'arthrose du genou ; l'âge et le sexe féminin pour l'arthrose de hanche. Il faudrait déterminer les facteurs de progression clinique et radiologique qui peuvent véritablement prédire, non seulement la détérioration de la hanche, mais aussi son incapacité. Or il n'y a pas d'étude de cohorte à long terme, à l'exception de l'étude de Framingham, qui est une cohorte ouverte. Une étude anglaise récente, l'étude Cask, vient de débuter. De plus, un projet a été lancé par la SFR le 12 octobre (Arthritis Day). Il a pour ambition de mieux connaître l'histoire naturelle et les facteurs pronostiques tout au long de l'évolution.
Les conséquences sur la qualité de vie.
Un questionnaire, le Womac, permet de mesurer les conséquences fonctionnelles de l'arthrose. Les facteurs qui entraînent des difficultés fonctionnelles sont l'obésité, le fait de vivre seul, de ne pas avoir de Sécurité sociale, de ne pas faire d'exercice, éventuellement d'être déprimé. En revanche, il n'existe pas vraiment d'instruments permettant de mesurer la qualité de vie. Dans cet esprit, le groupe qualité de vie en rhumatologie vient de développer un questionnaire spécifique de la qualité de vie. Cet instrument a déjà été largement testé dans plusieurs études, en Ile-de-France et en Lorraine. Il va être utilisé dans les études de cohorte pour mesurer les conséquences de la maladie et les facteurs qui déterminent la détérioration de la qualité de vie.
Pour conclure, le Pr Guillemin souligne que « les axes de recherche ont un retentissement économique : d'un côté, on dépense de l'argent pour mettre au point des produits innovants qui risquent d'être coûteux ; d'un autre côté, on peut permettre à la société de faire des économies en maintenant les patients en activité et en situation d'insertion sociale correcte. Il y a peut-être des investissements qui en valent la peine ! ».
D'après un entretien avec le Pr Francis Guillemin, service épidémiologie et évaluation cliniques, CHU Nancy.
* Dumond H et al. Evidence for a key role of leptin in osteoarthritis.
« Arthritis rheum » 2003 ; 48 : 3118-3129.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature