L'ORDONNANCE est un rituel. Point d'orgue du colloque singulier médecin-malade, elle est une feuille de papier que le médecin remet à son malade. Qui part avec. C'est sans doute pour cela que nombre de médecins, même férus d'informatique, aiment continuer à la rédiger à la main. Un sondage Ipsos publié en septembre 2003 montrait que dans un échantillon de généralistes équipés, 88 % utilisaient un logiciel pour gérer leur fichier patients, mais que seulement 69 % imprimaient leur prescription.
« La relation médecin-malade a quelque chose de très magique, estime pour sa part le Dr Dominique Dupagne, généraliste à Paris, informatisé pour la comptabilité et la télétransmission, et par ailleurs maître-toile du site Atoute.org. La remise du papier où sont inscrites les prescriptions fait partie de la prise en charge qui doit être personnalisée. »
Beau papier et stylo.
Lui-même, qui se considère comme un « esthète de l'ordonnance », n'a toujours utilisé que du papier grand format A4 « pour avoir plus de place pour les explications ». Un beau papier de préférence (du Marais médaille, pur chiffon et filigrané, à presque 1 euro la feuille à une époque !). « Parce que c'est la trace que le patient garde de son passage dans notre cabinet. J'aime bien écrire à la plume, bien rigide pour qu'elle puisse marquer le duplicata, et je photocopie l'ordonnance pour en garder la trace dans le dossier. »
Cet amour du stylo est partagé par le Dr Ludwig Fineltain, psychiatre et psychanalyste, qui fait toutes ses ordonnances à la main et « ne montre jamais une machine informatique à un patient ». « Je suis très porte-plume, explique-t-il, je fais des pleins et des déliés, j'ai une collection de stylos et j'adore l'écrit. » Ce qui ne l'empêche pas d'imprimer les ordonnances bizones.
Un rituel.
Malgré ce plaisir évident de la plume qui glisse sur le papier, le Dr Dupagne sait bien qu'il en viendra tôt ou tard à la prescription électronique, parce que les logiciels d'aide à la prescription sont de plus en plus performants. Mais aussi parce que le projet de dossier médical personnel prévoit d'y insérer les prescriptions électroniques.
Mais « fait main » ou non, l'ordonnance reste un rituel, si elle est délivrée avec l'accompagnement adéquat. C'est au médecin qui imprime ses ordonnances parce que c'est plus lisible et facile à stocker dans le dossier patient, de veiller à ce que son patient n'ait pas le sentiment que c'est l'ordinateur qui « crache l'ordonnance ». Il suffit, somme toute, de faire bonne impression.
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