L ES kératines constituent une famille d'une vingtaine de protéines du cytosquelette, qui sont exprimées dans les cellules épithéliales et sont classées en deux groupes : type I (kératines 9 à 20) et type II (kératines 1 à 8).
Les cellules épithéliales expriment au moins une kératine de type I et une kératine de type II, qui forment des hétéropolymères non covalents dans un rapport 1/1.
Les kératines 8 et 18 ont été initialement trouvées dans les épithéliums simple couche (exemple : foie, pancréas, intestin), alors que les hétéropolymères 5 et 14 sont présents dans les kératinocytes basaux des épithéliums stratifiés et que les hétéropolymères 1 et 10 sont présents dans les kératinocytes suprabasaux des épithéliums stratifiés.
Le foie et l'intestin de souris de laboratoire
Des études dans des modèles animaux ont suggéré que le foie et l'intestin peuvent être le siège de maladies en cas de mutations dans les gènes des kératines 8 et 18. Par exemple, dans une souche de souris déficientes en kératine 8, la plupart des embryons ont une hémorragie hépatique et meurent avant la naissance. Dans une autre souche, les souris ont un prolapsus rectal, une colite, une élévation modérée des aminotransférases, une fragilité hépatocytaire et une susceptibilité hépatique accrue à une hépatotoxine. Enfin, des souris transgéniques qui expriment en excès une kératine 18 mutante ont une hépatite chronique modérée, une fragilité hépatocytaire et une susceptibilité accrue à la toxicité médicamenteuse.
Ces résultats chez l'animal ont conduit à penser que des mutations des gènes des kératines 8 et/ou 18 pouvaient prédisposer à des affections aiguës ou chroniques du foie considérées comme cryptogénétiques. En 1997, l'équipe de Nam-On Ku (« J Clin Invest », 1997 ; 99 : 19-23) a déjà décrit une mutation (substitution d'une leucine pour une histidine en position 127) chez 1 patient sur 28 étudiés, ayant une cirrhose cryptogénétique.
La même équipe a continué à chercher des mutations des gènes des kératine 8 et 18 dans la cirrhose cryptogénétique.
L'étude de 150 foies explantés
Les nouveaux travaux ont porté sur 150 foies explantés (provenant des centres de transplantation de Californie) et 89 échantillons sanguins, provenant tous de trois groupes d'individus : 55 patients ayant une cirrhose cryptogénétique, 99 ayant une maladie du foie non cryptogénétique (alcool, auto-immunité, médicaments, virus) et 86 donneurs de sang sélectionnés au hasard (contrôles).
Parmi les 55 patients ayant une maladie hépatique cryptogénétique, les auteurs ont découvert cinq mutations dans le gène de la kératine 8 : trois mutations glycine-cystéine en position 61 et deux mutations tyrosine-histidine en position 53.
Ces mutations n'ont pas été retrouvées chez les patients ayant des maladies hépatiques non cryptogénétiques et chez les sujets contrôles.
« Des mutations dans le gène de la kératine 8 peuvent prédisposer à une maladie hépatique et peuvent expliquer une hépatopathie cryptogénétique chez certains patients », concluent les auteurs.
« New England Journal of Medicine » du 24 mai 2001, pp. 1580-1587.
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