SPÉCIALITÉ PEU CONNUE du grand public (les anatomo-cytopathologistes constituent la seule spécialité médicale sans contact direct avec les patients), la pathologie n'en est pas moins une spécialité centrale par sa fonction de diagnostic, notamment en cancérologie.
Les spécialistes de cette discipline sont aujourd'hui déstabilisés. Déstabilisés tout d'abord par le retard pris dans la mise en place de la CCAM-ACP (classification commune des actes médicaux pour l'anatomo-cytopathologie). Toute l'évolution tarifaire est ainsi bloquée depuis sept ans. En euros constants, estime ainsi le syndicat des médecins pathologistes français, présidé par le Dr Michel Guiu, la spécialité a connu en vingt ans une baisse de la rémunération de ses actes de 31 à 53 %. Dans le même temps, les ACP ont connu une importante augmentation de leur temps de travail, en grande partie issue du développement de l'aspect diagnostic de la cancérologie. Enfin, de nouvelles contraintes en matière de sécurité sanitaire, ou issues du plan Cancer, comme les comptes rendus-fiches standardisés (CRFS), ou encore la transmission de données et de prélèvements aux registres des tumeurs, ont participé à l'augmentation des coûts de l'ACP sans nouveaux moyens en regard, tout en accroissant leur charge de travail.
Les « anapaths » sont également fatigués de l'attitude de l'assurance-maladie à leur égard. Comme le rappelle leur syndicat, «alors que le diagnostic du pathologiste a des conséquences humaines pour le patient, et économiques pour l'assurance-maladie, la CNAM refuse la prise en charge d'un éventuel second avis auprès d'un expert hospitalier en cas de diagnostic difficile ou rare, le contraignant à payer lui-même cette consultation».
Une baisse des effectifs de 50 % en 2020.
Cerise sur le gâteau, si l'on peut dire, les anapaths sont aujourd'hui en conflit avec l'InVS (Institut national de veille sanitaire) et l'INCa (Institut national du cancer) qui souhaitent utiliser leur recueil de données épidémiologiques «sans reconnaissance ni rétribution», selon le syndicat qui a décidé, en attendant une solution, de s'opposer à la transmission de ces données, tant à l'InVS qu'à l'INCa.
Sans compter les tentatives de certains biologistes pour faire réintégrer l'ACP au sein de la biologie, sur fond de «volonté de contrôler les tumorothèques, et d'accentuer la position de la biologie dans les établissements publics et privés», indique encore le syndicat des pathologistes.
Pour les anapaths, le salut passe certes par une revalorisation des actes, mais aussi par une reconnaissance du «rôle stratégique que joue le pathologiste».
Faute de quoi, c'est le succès de la politique de prévention et de lutte contre le cancer qui pourrait être remis en cause. Un rapport de 2007 de l'Ordre des médecins prévoyait déjà une baisse de 50 % du nombre de pathologistes à l'horizon 2020 * : «Leur temps de travail a considérablement augmenté, avec des déséquilibres structurels et dynamiques menaçant la stabilité de la spécialité. Cette démographie incertaine altère déjà le service de santé publique.»
* On recense actuellement 1 435 médecins pathologistes en métropole. La moitié exerce en libéral, l'autre moitié en salarié.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature