Qui peut établir un certificat de décès ? Dans 75 % des cas, la question ne se pose pas. En clinique ou à l’hôpital, le médecin de l’établissement se charge du constat. À domicile en journée, les proches appellent le médecin traitant. Mais la nuit ou le week-end ?
Depuis la disparition des postes de médecin d’état civil, au début des années 2000 - généralement des libéraux liés à la commune par contrat pour établir les certificats de décès, touchant un fixe quel qu’en soit le nombre - les médecins qui assurent la permanence des soins (PDS) sont en première ligne. Mais ils sont confrontés à « un vide juridique », selon le président de conseil départemental de l’Ordre des médecins (CDOM) du Val-de-Marne (94), le Dr Bernard Le Douarin.
700 et 800 certificats par an
« Quand la famille appelle le médecin traitant, par usage éthique, ce dernier ne demande pas d’honoraires. En revanche, si un médecin de garde est appelé en urgence en nuit profonde, il n’a pas de raison de n’être pas honoré : il lui faut parfois traverser tout le département, montrer de la compassion à l’égard de la famille, passer du temps... Il doit être indemnisé », explique le Dr Le Douarin.
Une telle visite peut durer, sans le trajet, jusqu’à 30 minutes. « Il faut examiner le malade, voir si on ne peut suspecter un suicide ou une aide à mourir, établir le certificat, et faire preuve de savoir-vivre. En outre, 2 à 3 mois plus tard, la famille peut nous recontacter pour obtenir un certificat pour les banques », précise le Dr Charles Binetruy, gérant de Médecins à domicile 94. « Nous en faisons en moyenne 2 par jour dans le cadre de la PDS. Mais ce n’est qu’une moyenne : j’en ai fait 4 dimanche dernier ! ». Selon Bernard Le Douarin, chaque année, entre 700 et 800 certificats de décès sont effectués par les médecins de garde, après un appel au 15, dans le Val-de-Marne.
Hors nomenclature
L’établissement d’un certificat de décès n’est pas coté, l’assurance-maladie considérant qu’il n’y a plus d’assuré social. La rémunération du médecin revient donc à sa propre appréciation. Dans les faits, « on applique un tarif de visite normal en PDS, 53 euros, qu’on majore de 20 à 30 % », explique le Dr Binetruy. « En tant que médecin traitant, face à des patients en fin de vie, je ne demande rien. Mais la nuit, le week-end, on ne peut pas travailler gratuitement. Ce n’est pas simple de demander, mais la plupart des familles le comprennent », reconnaît-il.
Autre situation encore plus délicate, l’absence de famille. Absolument personne ne peut alors rémunérer le médecin. « Si c’est en journée, les médecins en cabinet, surchargés, déclinent la requête. Alors, on appelle le médecin de garde. Mais cela aboutit à des situations ubuesques où la police attend auprès du corps des heures et des heures qu’un médecin vienne, au détriment de toute considération sanitaire », souligne Charles Binetruy.
90 euros l’acte
Pour remédier à cette situation, le Dr Bernard Le Dourain demande donc que les médecins effecteurs du 15, intervenant dans le cadre de la PDS, soient indemnisés à hauteur de 90 euros par l’Agence régionale de santé (via la Caisse primaire d’assurance-maladie). Ce forfait existe déjà en Poitou-Charente. Le cahier des charges de Champagne-Ardenne prévoit, à titre expérimental, une rémunération de 70 euros dans l’Aube. Le Dr Binetruy insiste, lui, sur la nécessité d’un tel dispositif lors de l’absence de toute famille.
Le président départemental n’en est pas à sa première demande auprès de l’ARS, qui selon lui, a entrouvert la porte en demandant une estimation de ce que cela pourrait coûter.
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