LE DÉCONVENTIONNEMENT de trois médecins spécialistes par la caisse primaire d'assurance-maladie (Cpam) de la Drôme, pendant six mois à partir du 1er mai, pour cause de dépassements d'honoraires « abusifs » et « atypiques » (« le Quotidien » d'hier), a été perçu comme une déclaration de guerre par certains spécialistes libéraux du département.
Cette sanction ultime (car les actes des praticiens hors règlement conventionnel minimal seront remboursés moins de 1 euro par la Sécu) est jugée « très provocatrice » par les gynécologues obstétriciens de la Drôme et de l'Ardèche alors qu'ils avaient, dès le 15 janvier, informé le préfet de Valence de leur intention d'arrêter les accouchements au premier déconventionnement d'un spécialiste par la caisse primaire.
Résultat : les gynécologues obstétriciens libéraux de ces deux déparements annoncent maintenant, dans une lettre adressée à la direction de la Cpam de Valence, qu'ils « arrêteront leur activité obstétricale à partir du 16 mars 2004 (pendant) 24 heures : sous réserve que d'autres mesures de déconventionnement n'interviennent pas avant cette date-là, auquel cas (leur) cessation d'activité serait immédiate ».
Cet ultimatum est signé par cinq praticiens seulement, dont le Dr Gauduchon, déconventionné avec deux anesthésistes. Mais ils représentent la quasi-totalité des obstétriciens libéraux du bassin valentinois (hormis deux autres médecins installés en secteur II).
2 300 accouchements en jeu.
« Nous faisons à nous cinq 2 000 accouchements par an - 1 300 à la clinique Pasteur à Guilherand-Granges en Ardèche et 700 à la clinique Générale de Valence -, soit deux tiers des accouchements (du secteur). On ne sait pas si l'hôpital va pouvoir les prendre en charge », déclare le Dr Werner Lutz.
Dans leur lettre, les obstétriciens demandent à la direction de la caisse d' « assumer publiquement la responsabilité de la suppression de l'obstétrique libérale en Drôme-Ardèche, c'est-à-dire le libre choix pour les parturientes de leur accoucheur et de l'endroit de leur accouchement », ainsi que « tout incident ou accident » lié à la fermeture des deux maternités privées et « mettant en jeu la sécurité de ses assurées ».
Les cinq obstétriciens précisent qu'ils vont « expliquer » leur décision aux patients et qu'ils poursuivront leur activité seulement si la Cpam « retire ses démarches de déconventionnement ».
De son côté, la Conférence nationale des associations de médecins libéraux (Cnamlib, issue des coordinations), qui affirme représenter « plus de 5 000 médecins spécialistes libéraux répartis sur 50 départements », demande, dans une lettre au Premier ministre, une « intervention rapide du gouvernement » afin de « désamorcer la crise majeure qui s'annonce ».
Pour la Cnamlib, les procédures d'exclusion du RCM contre des spécialistes de secteur I pratiquant des dépassements tarifaires s'expliquent par le choix du président et du directeur de la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam) de « recourir à des méthodes autoritaires ».
Le Dr Guy Schucht, président de la Cnamlib, prévoit « une vague de déconventionnements solidaires sur toute la France ». « Elle sera massive sur certains départements, ajoute-t-il, et ne cessera que lorsque la Cnam aura décidé de privilégier le dialogue à la contrainte. »
Par ailleurs, la Cnamlib « appelle tous les médecins spécialistes libéraux, ouverts à toutes les propositions mais qui ne sauraient transiger avec la qualité des soins (...) à signifier dans les meilleurs délais à leur Cpam (...) leur passage dans le secteur conventionnel à honoraires différents », autrement dit leur entrée de fait en secteur II.
Enfin, la Cnamlib accuse le président et le directeur de la Cnam de « mettre en danger la protection sociale des assurés, particulièrement des plus démunis », et appelle le ministre de la Santé à « dessaisir » la Cnam du dossier de la médecine spécialisée libérale.
A la Cnam, on rappelle simplement qu' « une des missions de l'assurance-maladie consiste à veiller au respect des tarifs conventionnels qui constituent un élément essentiel de l'égalité d'accès aux soins » et qu'il lui appartient « d'utiliser le cas échéant les moyens juridiques existants et adaptés à chaque cas pour que ces tarifs soient respectés ».
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