INITIALEMENT CRÉÉ à l’université du Texas, le programme Patient Partenaire (PPP) consiste à faire intervenir des patients, le plus souvent atteints de polyarthrite rhumatoïde (PR) auprès de professionnels de santé, notamment les étudiants en médecine. Dès 1997, le projet de mener ce programme en France a été retenu sous l’égide de l’Association française de lutte contre le rhumatisme (Aflar), en partenariat avec les Laboratoires Pfizer, engagés dans une démarche de mécénat international dans plus de 20 pays.
A ce jour, 13 CHU situés aux quatre coins de la France ont intégré dans l’enseignement traditionnel, sous la responsabilité des professeurs de rhumatologie, des patients formateurs atteints de polyarthrite rhumatoïde, volontaires et spécialement formés. «Depuis le début, on a souhaité développer en France un programme Patient Partenaire qu’on a voulu à la française, en mettant au premier plan le vécu de la maladie par les patients. Ces derniers sont de véritables experts pour ce qui est de vivre avec une maladie chronique. Dans le système français, les médecins sont très bien formés, mais il est vrai que dans les livres on ne trouve pas cette vision très complémentaire de la vision scientifique pure et dure, qui est le vécu de la maladie au quotidien. Un élément pourtant essentiel dans l’optique d’un bon dialogue entre le soignant et le soigné, qui demeure à la base de tout succès dans la prise en charge thérapeutique», souligne le Pr Liana Euller-Ziegler, chef du service de rhumatologie du CHU de Nice, qui coordonne le programme depuis sa mise en place dans l’Hexagone.
Outre l’examen clinique des mains ou des poignets, en pratique facilement accessibles et souvent touchés par la maladie, le programme met ainsi au premier plan le vécu de la PR au quotidien, son retentissement psychologique, ses conséquences personnelles, familiales, sociales ou professionnelles. Ouvert aux étudiants en médecine de 2e cycle, ce programme d’enseignement complémentaire et facultatif se réalise sous forme de sessions d’une heure environ, regroupant de 3 à 5 étudiants autour de chaque patient formateur. Actuellement, près de 80 patients formateurs font vivre le PPP, déjà suivi par 1 500 étudiants. «Nous essayons d’accroître le nombre d’hôpitaux qui participent au programme mais nous ne pouvons pas aller trop vite. La formation de ces patients est une entreprise longue et la démarche qualité fait qu’on ne pourrait pas en former un nombre trop important à la fois. On a besoin également de la volonté des responsables d’enseignement dans chaque CHU ou hôpital qui veut s’investir dans un programme qui demeure très clairement chronophage pour les professeurs de rhumatologie.»
Qualité de l’enseignement.
Outre des brochures et des fascicules préalablement distribués, la formation des patients s’effectue dans le cadre de séminaires nationaux de deux jours. Sur un mode interactif, ils abordent la maladie, son diagnostic, son évolution et ses conséquences, ses traitements, médicamenteux ou non, ainsi qu’une formation à la communication, pour aboutir à une mise en situation du travail d’enseignant que les malades auront à accomplir par la suite.
Une qualité d’enseignement évaluée aussi du côté des étudiants qui suivent ces sessions. «Nous avons construit des outils d’évaluation spécifiques du programme français, avec notamment un pré-/post-test explorant les progrès des étudiants dans les domaines du savoir, du savoir-faire et du savoir-être, et une appréciation multidimensionnelle des sessions à la fois par les étudiants et les patients-formateurs. La première évaluation, menée sur les 100 premiers étudiants des universités de Nice et de Lille, a été extrêmement positive, avec une très grande satisfaction tant des patients formateurs que des étudiants.»
Le succès du programme Patient Partenaire consacré à la polyarthrite rhumatoïde conduit à étendre l’expérience à d’autres affections chroniques dont le retentissement sur la qualité de vie est très important, à l’instar d’autres rhumatismes chroniques ou de certaines maladies respiratoires comme la Bpco. «Malgré les progrès réalisés en France, la douleur reste une grande méconnue. Vivre avec la douleur, c’est parfois découvrir que, pour un patient, qui n’en parle pas forcément, cette douleur n’est pas comprise par son entourage, qu’elle est fluctuante, qu’elle ne se voit pas mais peut avoir un retentissement psychologique très important. L’entendre de la bouche même de la personne qui la vit au quotidien sensibilise énormément l’étudiant. De même, savoir comment les patients ont vécu l’annonce de leur propre diagnostic, ça enseigne beaucoup de choses sur la façon de gérer ce moment délicat. C’est vrai qu’on le dit souvent en cours et dans les services, mais quand en plus un étudiant entend un patient qui est passé par là et qui raconte combien ce moment peut être épouvantable pour la personne qui a reçu le diagnostic, le message est autrement plus fort.»
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