- L'accident et ses causes
Entre le 11 avril 2006 et le 18 avril 2007, 145 malades traités par radiochirurgie intracrânienne ont subi des surdosages. L'accident est dû à une erreur d'étalonnage de l'accélérateur. Erreur «exclusivement due à un non-respect de la procédure établie par le constructeur sur un seul point», selon l'IRSN .
Le rapport de l'IGAS et de l'ASN met de son côté en cause le CHU de Toulouse. Pour développer la radiochirurgie stéréotaxique, il s'est d'abord tourné vers le centre de lutte contre le cancer, l'institut Claudius-Regaud (ICR), mais les deux structures n'ont pas réussi à s'entendre. Le CHU a alors cherché dans le secteur libéral les compétences qui lui manquaient et le Centre de radiochirurgie stéréotaxique (CRRS) a été créé en passant convention avec la clinique des Cèdres, le CHU de Limoges et un groupe de radiothérapeutes libéraux. L'IGAS et l'ASN reprochent au CHU de n'avoir, malgré les observations qui lui avaient été faites, «jamais voulu rééquilibrer l'organisation de son centre en prenant mieux en compte les besoins de la radiothérapie et de la radiophysique, qui sont restées les maillons faibles du projet». L'erreur à l'origine de l'accident est intervenue au cours de la phase de calibrage du collimateur multilames, au cours de l'étape très délicate de la configuration du logiciel de dosimétrie. Les équipes plus avancées dans ce type de projet «n'ont pas été suffisamment consultées». Les contrôles internes se sont limités à la seule procédure prévue par le fabricant, le détecteur employé étant inadapté à la taille des champs à mesurer. Ils ne permettaient pas de détecter l'anomalie, qui n'a été découverte qu'un an plus tard et fortuitement.
- L'information des victimes
Le signalement aux autorités a été rapide : il a eu lieu le 20 avril 2007, trois jours après que le CHU a été informé du problème. L'information des victimes, en revanche, a été partielle et tardive. La majorité des malades, à l'exception de ceux de la clinique des Cèdres, ont appris par les médias le surdosage, dans la deuxième quinzaine de mai. Les médecins des CHU de Toulouse et de Limoges ont adressé aux patients, entre le 10 et le 16 mai, une lettre confirmant ou avançant le rendez-vous de contrôle déjà prévu, mais sans évoquer le surdosage.
- Les conséquences pour les patients
Sachant que les lésions radio- induites peuvent apparaître de plusieurs mois à plusieurs années après l'irradiation, l'impact sanitaire des surdosages ne pourra être établi que dans deux ou trois ans. L'IRSN, relève pour l'heure, en particulier chez les patients traités pour un neurinome, l'accroissement de la morbidité neurologique, conséquence directe de la surirradiation subie. Il se traduit notamment par des paralysies faciales de grade modéré à sévère, des névralgies et des déficits auditifs. En ce qui concerne les décès, il n'a pas été mis en évidence de relation avec les surdosages.
Le rapport IGAS-ASN tient à souligner «l'état sanitaire dégradé des malades». La moitié des personnes qui n'étaient pas porteuses de tumeurs malignes présentent des symptômes qui n'existaient pas avant l'irradiation ou qui se sont accentués depuis. Et l'état de certaines d'entre elles s'est récemment aggravé.
- Les recommandations
L'IRSN recommande un suivi clinique au moins jusqu'en 2012. Il va être chargé de centraliser le suivi des complications. Il devra aussi s'assurer qu'il n'y a pas eu de surdosage chez les 27 autres patients traités par collimateur circulaire.
A Toulouse, il est nécessaire de rebâtir un cadre adapté, en demandant au CHU et à l'ICR d'élaborer un projet commun équilibré, sans exclure pour autant le secteur libéral, et sans attendre l'ouverture du site de Langlade prévue à l'horizon 2012.
Au plan national, outre les enquêtes de sécurité sanitaire, une enquête médico-économique doit être menée sur l'ensemble du secteur, formé de structures petites et dispersées qui utilisent les rayonnements ionisants à des fins thérapeutiques. Il faut aussi élaborer un plan « accident sérielle », à l'image du plan blanc, pour indiquer aux hôpitaux la réponse en cas d'accident ou d'infection iatrogène sériel. Enfin, il faut revoir le cadre général de la radiochirurgie stéréotaxique, en refusant l'installation isolée d'accélérateurs de particules hors de plateaux techniques suffisamment dotés en radiophysiciens et en radiothérapeutes.
Rapports disponibles sur les sites de l'ASN et du ministère de la Santé : asn.fr et sante.gouv.fr.
Niveau 4
L'accident de radiochirurgie du CHU de Toulouse avait dans un premier temps été classé au niveau 2 sur l'échelle de gravité élaborée par l'ASN et la Société française de radiothérapie oncologique, qui en compte sept (Epinal est classé au niveau 6). Au vu des complications neurologiques déjà constatées chez des patients surirradiés, il a été reclassé au niveau 4.
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