EN 1998, LA SOCIÉTÉ Danone avait refusé le lait de vaches de plusieurs éleveurs installés à Halluin, en raison de taux de dioxine supérieurs aux normes. Des analyses complémentaires menées par les services vétérinaires confirmaient ces résultats et entraînaient l'abattage de tous les bovins élevés aux alentours de l'usine.
Depuis, l'incinérateur a été fermé, tout comme ceux de Sequedin et Wasquehal, très proches. Mais l'inquiétude est demeurée chez les riverains, quant aux conséquences éventuelles pour leur santé des rejets de dioxine opérés pendant trente ans.
Pour en avoir le coeur net, l'URMEL a décidé d'effectuer une étude d'impact auprès de la population. Quatre-vingt-dix-huit personnes vivant sous le panache de l'usine (des adultes de 30 à 65 ans non exposés professionnellement aux dioxines) ont fait l'objet d'un prélèvement sanguin et d'un questionnaire médical, dont les résultats ont été comparés à un échantillon témoin de 29 personnes résidant à Orchies, commune éloignée de plus de 20 km de tout incinérateur.
Dans les aliments.
Les résultats de l'enquête sont assez mitigés. Ils relèvent un taux de dioxine à peine plus élevé à Halluin que dans la zone témoin : 43,15 pg/g contre 39. En revanche, ces taux sont beaucoup plus élevés que la moyenne nationale établie à 27,7 pg/g, ce qui révèle un taux d'imprégnation régional très important. Et ils dépassent 54 chez les personnes qui consomment une forte proportion d'aliments de leur propre production (potager ou élevage).
«De nombreux facteurs peuvent expliquer cette forte imprégnation, note Jean-Marc Rehby, président de l'URMEL, le Nord- Pas-de-Calais est une région très industrialisée, avec une population très dense et un trafic routier intense. C'est aussi une région où l'on se chauffe beaucoup. Tous ces éléments peuvent expliquer ces taux élevés.» «Ils sont inquiétants pour la santé, estime le médecin . On connaît bien aujourd'hui les conséquences des intoxications aiguës à la dioxine; en revanche, on connaît moins bien les effets d'une exposition chronique. On constate une augmentation de certains cancers (notamment du sein et des poumons) et l'on soupçonne la dioxine d'être responsable de certaines malformations chez les nouveau-nés et d'accouchements prématurés. Cette étude pose beaucoup de questions… Aujourd'hui, la balle est dans le camp de l'État.»
L'URMEL et les élus réclament notamment un registre des cancers qui permettrait de déterminer l'influence de l'environnement sur certains cancers. Sa création est prévue, mais son périmètre se réduit comme peau de chagrin, pour des raisons budgétaires. Seules la ville de Lille et quelques-unes de ses voisines sont concernées. Et l'exposition aux risques professionnels n'est pas incluse dans l'étude !
En attendant des normes plus draconiennes, l'URMEL fait quelques recommandations aux riverains qui vivaient sous le panache de l'ancien incinérateur : évitez de consommer des volailles élevées en liberté, ainsi que leurs oeufs, et signalez à votre médecin traitant une consommation ancienne de produits locaux.
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